Nicolas Hulot : prendre le temps et changer les démocraties
« Agir pour la planète », tel était le titre de la conférence organisée par la Fondation du Mont-Saint-Michel et donnée par Nicolas Hulot en octobre dernier. Devant une centaine de personnes particulièrement attentives, l’ancien ministre a insisté sur l’urgence d’agir pour notre planète. Comment ? En prenant du temps, en prônant le partage et en invitant le public à la révolution des consciences et au changement des démocraties. Synthèse.
Le troisième saut, celui du sens
« Nous sentons bien que nous sommes dans une période critique, où se jouent notre propre destin et notre survie » commence Nicolas Hulot dans la salle du superbe Prieuré d’Ardevon dans la baie du Mont-Saint-Michel. Il enchaîne naturellement sur la peur tout en la prenant vite à rebrousse-poils : « Mais devons-nous nous effrayer de cette peur ? Elle nous a aussi été donnée pour réagir ». Et pour lui, il est temps de franchir une nouvelle étape, celle qu’il qualifie de « troisième saut ». L’humanité est en effet, selon lui, marquée par trois sauts : celui de la vie, celui de l’esprit et aujourd’hui, celui du sens. il cite Einstein : « Notre époque se caractérise par la profusion des moyens et la confusion des intentions ». Une citation qu’il renforce par une autre, du sociologue Edgar Morin cette fois, pour qui « nous ne sommes pas victimes d’une faiblesse mais d’une trop grande réussite ».
Redéfinir la liberté
Nicolas Hulot développe ce fameux troisième saut et mentionne le couple indissociable « progrès et avenir » : « Nous avons été conditionnés par un modèle qui portait en son sein sa propre obsolescence », révèle-t-il avant de déplorer notre manque de volonté à nous fixer des limites. L’ancien ministre de la transition écologique en vient ensuite naturellement à la notion de liberté. Il constate qu’aujourd’hui, il semble que nous ayons cédé au principe suivant : « tout ce qu’on peut faire, on le fait, tout ce qu’on peut se payer, on se le paye », au nom d’une certaine liberté synonyme d’absence de règles ou d’émancipation de ces dernières. « Pourtant, la liberté, c’est la règle qu’on se fixe à soi-même », affirme-t-il avant de citer Albert Camus : « Un homme, ça s’empêche ».
« On ne peut pas imaginer une humanité qui ne partage pas »
Le message est clair : c’est la fin du « système du toujours plus ». « Pour moi, il y a deux humanités : l’une, visible et limitée, dont le but est de s’accaparer le bien commun, et l’autre, moins visible et plus vaste, qui agit pour le protéger », analyse-t-il. Reste à créer une alliance au sein de cette deuxième humanité, autour d’un maître mot : la solidarité. Il s’agit de revenir aux sources des choses, de faire l’inventaire de tout ce qui est toxique. « Quand l’OIT (Organisation Internationale du Travail) a été créée après la deuxième guerre mondiale, l’économie était au service de l’épanouissement humain. La tendance a changé… On vit dans un monde qui ne partage pas, qui épuise », constate-t-il. Pour renverser la tendance, il propose de garder ce qu’il y a de vertueux dans l’ancien monde, ou encore, plus concrètement, de transformer complètement la fiscalité « en mettant le paquet sur les revenus qui proviennent pas du travail mais des rentes, de la spéculation ». Pour lui, c’est clair, « on ne peut pas imaginer une humanité qui ne partage pas ».
Révolutionner les consciences et changer les démocraties
Il interroge ensuite le public sur ce qui nous manque pour sortir de tout ça et répond lui même à la question : « le temps et une intelligence collective ». Il appelle alors à une révolution des consciences. Pour lui, la révolution se fera de gré ou de force. Alors autant qu’elle se fasse de gré… Mais comment faire ? Selon Nicolas Hulot, on sait ce qu’il faut faire mais on ne sait pas comment faire. En plus de prendre le temps de réfléchir, il prône aussi la création de comités de « vrais gens » pour les associer à la complexité des différentes problématiques, s’inspirer de leurs idées, de leurs propositions. Il s’agit notamment de différencier l’essentiel du superflu. Il en profite pour dénoncer l’attitude des médias « qui ne font qu’entretenir la confusion et ont une attitude mortifère, alors que nous avons besoin d’idées ». Pour lui, il n’existe pas d’autre solution que de changer nos démocraties, les rendre plus inclusives. Il revient aussi sur la notion de peur avec une citation de Saint-Augustin qui tombe à propos pour affiner son discours : « La crainte de perdre de ce que nous avons nous empêche d’atteindre ce que nous voulons» . Alors, révolutionnons nos consciences et changeons nos démocraties !
Par Elisabeth Blanchet
Ancienne prof de maths, je me suis reconvertie dans le photo journalisme en 2003 à Londres où je vivais. J’ai travaillé pour différents magazines dont Time Out London et j’ai développé des projets à longs termes dont un sujet les préfabriqués d’après-guerre, une véritable obsession qui perdure, les Irish Travellers -nomades Irlandais- dans le monde, les orphelins de Ceausescu - je suis des jeunes qui ont grandi dans les orphelinats du dictateur depuis 25 ans -. Je voyage beaucoup et j’adore raconter des histoires en photo, avec des mots, en filmant, en enregistrant… Des histoires de lieux, de découvertes mais surtout de gens. Destinations de cœur : Royaume-Uni, Irlande, Laponie, Russie, Etats-Unis, Balkans, Irlande, Lewis & Harris Coup de cœur tourisme responsable : Caravan, le Tiny House Hotel de Portland, Oregon – Mon livre de voyage : L’Usage du Monde de Nicolas Bouvier – Le livre que je ne prends jamais en voyage : L’oeuvre complète de Proust à cause du poids – Une petite phrase qui parle à mon cœur de voyageur : « Home is where you park it »
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