Comment légitimer la pratique touristique dans une perspective durable
Directeur de recherches au CNRS
Comment légitimer la pratique touristique dans une perspective durable
Le lien entre mobilité, liberté et voyage est très fort. Le tourisme est le vecteur humain de la mondialisation, d’une mondialisation des échanges et des rencontres culturelles. Les lieux de culture se sont également déplacés, par exemple par le biais de la cuisine.
La question de l’empreinte écologique de l’ensemble des pratiques touristiques doit être posée. Tant que l’on se plaçait dans une idéologie du progrès, des outils ont été construits grâce à la relation entre idéologie du progrès, progrès technologique et lutte sociale. Une nouvelle idéologie doit être saisie, mais dans le même temps, la difficulté va être de ne pas en faire une idéologie mais un projet. A Copenhague a été décidée la diminution de l’empreinte écologique de l’homme, avec des objectifs chiffrés différenciés entre les pays du Nord et ceux du Sud.
Mais la question est de savoir comment opérer un choix rationnel avec des objectifs quantitatifs. Notre relecture durable du monde est une relecture représentant des choses extrêmement différentes : notre société ayant perdu le sens de son horizon, et le politique étant incapable de prévoir les modes de vie en 2050 ou 2100, le durable remplit le désir de sens des hommes. L’individu se saisit de ce projet car la peur de la mort fait qu’il veut être porté par une idée qui va au-delà de sa propre existence. C’est le fondement du totalitarisme, qui promet à l’homme que son système de valeurs perdurera après sa mort.
En donnant des droits aux générations futures et passées, l’écologie et la protection du patrimoine enlèvent des droits au présent, et remet en question le principe démocratique : les votants actuels ont perdu des droits au bénéfice des votants passés et futurs. La mondialisation ne peut effectivement pas être démocratique. La conciliation entre démocratie et écologie est ardue et il convient d’être vigilant, en ne versant pas dans le totalitarisme. Historiquement, la sacralisation de la nature a été instaurée par le protestantisme, en opposition au catholicisme. Cet apport du protestantisme est entré dans notre culture : la beauté de la nature va se trouver à égalité esthétique avec un tableau ou un monument. Cette histoire est une histoire de relation religieuse, de relation à l’incertitude. La partie dangereuse de l’écologie est sa tendance hégémonique, la partie positive résidant dans la nécessaire protection de la nature. Il ne faut pas confondre protection des droits des générations à venir à vivre sur une planète saine et idéologie conservatrice sur le statut du vivant. La question du statut des femmes se pose également dans ce cadre.
La question délicate de l’équilibre entre l’innovation-construction et la protection-conservation doit être débattue avec prudence. Il faut également accepter que l’homme puisse décider de mourir, c’est le propre de la démocratie. Personne n’a le droit, soit-il scientifique, d’interdire à l’homme de disparaitre s’il le souhaite. La liberté démocratique du choix doit être placée au-dessus de tout.
Sur ces enjeux, la question est de construire un système de valeurs, de
comprendre que la société actuelle n’est plus une société de classes,
mais une société de responsabilité individuelle, car chacun est
coproducteur de ses échecs et de ses réussites. Dans ce type de société,
l’individu a besoin de totems élévateurs, de lieux qui symbolisent ces
nouvelles valeurs. Il peut s’agir d’un totem écologique.
Le développement durable symbolise un nouveau sens, un nouveau respect
des générations futures et des générations passées. Mais en premier
lieu, l’individu cherche du lien, il circule dans un imaginaire.
L’imaginaire du développement durable est l’imaginaire de notre époque,
mais il est déjà dépassé. Il faut réfléchir à « l’après », à
l’imaginaire de demain. Le nouvel imaginaire est peut-être déjà à
l’oeuvre.
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Par Rédaction Voyageons-Autrement
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