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Escapade dans le MARAIS VERNIER, une réserve naturelle normande

| Publié le 8 juin 2021
Thèmatique :  Espaces protégés   Labels   Territoire   Vélotourisme 
             

Une envie de vert hors des sentiers battus ? Direction le marais Vernier, situé au cœur du Parc naturel régional des Boucles de la Seine Normande. Cette réserve biologique vous révèlera ses trésors : 4500 hectares de roselières, prairies humides et tourbières qui abritent une avifaune rare. Balbuzards pêcheurs, courlis cendrés et cigognes blanches se succèdent au fil des saisons. Pour prendre de la hauteur, montez en selle pour sillonner la route des Chaumières. La belle bucolique traverse le marais et longe des pâturages jardinés par des vaches écossaises et des chevaux camarguais. Sortez vos bottes, casques et jumelles ! (A l’heure où ces lignes sont écrites, il faudra patienter un peu pour s’y rendre mais mieux vaut préparer son voyage… et il est toujours bon de rêver !)

Observatoire Grand’Mare, marais Vernier © JF Drone N. Caux

Un îlot de nature en bordure de Seine

Situé dans le département de l’Eure (27), sur la rive gauche de la Seine, le marais Vernier abrite en superficie la plus importante tourbière de France. Cette réserve naturelle tient sa richesse d’une mosaïque de milieux acides et alcalins. Gérée par le Parc naturel régional des Boucles de la Seine Normande, elle compte parmi les Natura 2000[1] et son écosystème original a été récompensé en 2016 par le label international Ramsar[2] .

Vestige d’un ancien méandre de la Seine, le marais Vernier dessine un golf de plaines marécageuses, sur 45 km2. Limité au nord par le fleuve, aux abords du pont de Tancarville, il s’achève au sud par des collines boisées, marquant la fin du plateau crayeux du Roumois. Cette situation au fond de l’estuaire lui confère un intérêt biologique accru. Le marais pourrait tirer son nom « Vernier » des aulnes qui peuplent largement les parcelles et qui, en vieux français, se prononçaient « verne ». Voilà pour sa carte d’identité.

[1] Natura 2000 est un réseau de sites européens reconnus pour leur intérêt écologique. L’objectif est de conserver les milieux naturels et espèces dans un bon état, en harmonie avec les activités humaines qui s’y exercent.

[2] Le label Ramsar est un traité international adopté en 1971 qui a pour but de valoriser la richesse écologique d’une zone humide d’exception, ses valeurs sociales et culturelles.

Histoire d’eau : terres marécageuses et bocages normands

L’histoire de ce site est liée à celle des hommes qui voulurent le maîtriser. Du Moyen-Age au plan Marshall des années 1950[1], le marais Vernier a connu des tentatives répétées d’assèchement pour livrer les terrains à l’agriculture. Parmi celles-ci, l’édit royal d’Henri IV en 1599 qui en ordonna le dessèchement. La construction de la digue (en partie disparue) fut confiée aux Hollandais. La partie nord du marais moderne, alluvionnaire, a été exploitée dès le 19e siècle, pour l’agriculture intensive.

La nature du sol du marais ancien n’a toutefois permis qu’un élevage sur prairie, aujourd’hui, transformée en zone de chasse ou en herbage. Canaux et fossés mènent au seul étang naturel de la région : la Grand’Mare, en plein cœur de la réserve. Dans la partie sud, villages de chaumières, vergers et « courtils » dominent le paysage. Ainsi appelle-t-on ces terrains, parcellisés équitablement entre les habitants du marais en longues bandes étroites, et bordés de saules têtards et d’aulnes. Jadis dédiés à l’élevage familial et au maraîchage, ces jardins sont à l’abandon. Quant aux chaumières, elles se hissent à mi-pente de la route. Ces habitations traditionnelles construites avec les matériaux locaux, en chaume, bois, torchis et silex, ont aujourd’hui la cote !  

Ce paysage de carte postale au riche patrimoine naturel et bâti n’est pas figé. Il suit les évolutions socio-économiques et se plie aux préoccupations écologiques. Aujourd’hui, l’agriculture tend à disparaître, les fermes deviennent des résidences secondaires et la gestion environnementale prend de l’ampleur… car le réchauffement climatique n’épargnerait pas la réserve avec la remontée des eaux.

[1] Le plan Marshall était un programme américain de prêts accordés aux différents États de l’Europe pour aider à la reconstruction des lieux bombardés lors de la Seconde Guerre mondiale. 


Chevaux camarguais, marais Vernier ┬®Eure, J.F. Lange

Faune et flore rares

Paradis des oiseaux. Situé sur un couloir de migration, les sites du marais Vernier et de « la Grand’Mare » présentent un intérêt ornithologique de taille au sein de l’estuaire de la Seine. La nourriture abondante de ces milieux humides attire les oiseaux sédentaires et migrateurs par milliers. Plus de 300 espèces y sont recensées : au printemps, cigogne blanche, Balbuzard pêcheur, Spatule blanche, Râle des genêts et courlis cendré (menacé d’extinction) arrivent du Sud de l’Europe ou d’Afrique pour se reproduire ; les hivernantes, telles que la Sarcelle d’hiver et la bécassine des marais, rejoignent plans d’eau et prairies inondées, à la recherche d’un climat plus clément.

Par ailleurs, le marais tourbeux fait l’objet d’une chasse au gibier d’eau dans un cadre très réglementé. Près de 115 mares de chasse au gabion, réparties sur 800 hectares, sont exploitées par des associations de chasseurs et des propriétaires cynégétiques. Les bois des coteaux représentent également des réservoirs à sangliers.  

« Jardiniers de la réserve » : c’est le doux nom attribué aux vaches écossaises (Highlands Cattle) et aux chevaux camarguais, introduits dès les années 1970, qui vivent à l’état semi-sauvage. Choisis pour leur rusticité, ces débroussailleurs entretiennent le milieu, épaulés par des vaches bretonnes Pie Noire et des moutons Shetland. Vous pouvez les apercevoir en empruntant la Route des Chaumières et au cœur même de la réserve.

Flore remarquable. Les marais alcalins, les eaux saumâtres et les mares favorisent une biodiversité impressionnante. Roseaux, iris, orchis à fleurs lâches, droseras, troscarts des marais, cirses des Anglais et plantes carnivores – dont la Rossolis intermédiaire, une protégée du marais – sont friands des milieux tourbeux. Sans oublier les vergers en bordure de la réserve qui offrent aux gourmands pommes, poires, prunes et cerises !

Rossolis intermédiaire, marais Vernier © R. Siccard

La green attitude pour l’Eure

Tourisme et pédagogie. Depuis la mode du tourisme vert, le département de l’Eure met les bouchées doubles pour charmer les visiteurs avec le marais Vernier. Situé entre Paris et la côte normande, il est un atout majeur. L’enjeu étant de concilier tourisme et protection de l’environnement. Accueillir les amoureux de la nature doit s’accompagner d’une fréquentation respectueuse du milieu. Tout comme les 12 sites naturels du département, la réserve bénéficie d’un « programme de valorisation pour prendre conscience de la beauté et de l’utilité de ces fragiles écosystèmes ». Des sentiers balisés, des plaquettes pédagogiques, des tables d’orientation, des observatoires ornithologiques et des visites guidées ont été mis en place. Pour compléter la découverte de la réserve, les voyageurs peuvent s’aventurer sur la Route des chaumières, profiter des marchés locaux et des activités nature. Car le marais Vernier et ses alentours peuvent se découvrir en mode slow tourisme : à pied, à vélo, en calèche, à dos d’âne et même en parapente pour certains initiés…

Route des chaumieres┬®Eure, A. Chetcuti

Chaumières, marais Vernier © A. Ricard

Promenades et observations ornithologiques :

Des visites guidées sont organisées dans la réserve une bonne partie de l’année, sauf en hiver quand le marais n’est pas praticable, à moins d’endosser son scaphandre ! ces sorties de sensibilisation aux milieux humides sont conduites par des guides nature du Parc naturel des Boucles de la Seine normande. Réservation obligatoire. pnr-seine-normande.com

L’observatoire de la Grand’Mare est implanté au sein de la réserve, à Sainte-Opportune-la-Mare, pour découvrir les oiseaux présents toute l’année et les actions de gestion et suivis scientifiques. Longue-vue à disposition. Le parc a édité deux brochures : « Les oiseaux des Marais » et « Où observer les oiseaux », avec les périodes et sites d’observation.

Le chemin de découverte du Marais Vernier compte un peu moins de six kilomètres, sur terrain plat. Situé sur la commune de Marais-Vernier, ce parcours soigneusement balisé est ouvert de début avril à mi-septembre.

La Route des Chaumières (53 km carrossable) traverse le marais Vernier sur une quinzaine de kilomètres au fil d’une poignée de villages. Les maisons typiques à pans de bois et aux toits de chaume coiffés d’iris se découvrent sur les pentes boisées. Comptez environ 25 km pour le tour complet du marais par la RD 103.

Les points de vue. Les panoramas du village du Marais-Vernier, de Bouquelon et du phare de Saint-Samson-de-la-Roque, perché sur une falaise, offrent une vue magique sur le marais et la vallée de la Seine. Avec un peu de chance, vous pourrez admirer les parapentistes chevronnés du pays survoler la réserve… à défaut d’un baptême de parapente qui n’est pas encore d’actualité.

Cigognes & cigogneaux, marais Vernier © G.Ranvier

Recommandations

Voici une sélection d’activités, restaurations et hébergements pour faciliter et agrémenter votre séjour.

Vélos & artisanat

El Camino • Location de vélos électriques, de la 1/2 journée à la semaine.

L’escargotier • Passeuse d’un savoir-faire ancestral, Lucile transmet l’art de tresser des éléments naturels lors de stages de vannerie sauvage. Elle utilise les fibres végétales disponibles au gré des saisons. À partir de branches de saule, noisetier, clématite, jonc, carex, … vous pourrez créer votre vannerie spiralée, sur fond plat ou sur arceau.

Les étapes gourmandes

Le marché aux pommes et de producteurs locaux se tient tous les premiers  dimanches, sur la place du village de Sainte-Opportune (d’octobre à avril).

Apiwilly • Passionné par la nature et les abeilles, Wilfried s’est reconverti pour devenir apiculteur. Soutenu par sa compagne Émilie, il veille sur 200 ruches pour produire « un miel normand d’exception ».

L’Auberge de l’Etampage • Sur la Route des Chaumières, au sommet d’une colline, cette longère fleurie à colombage résiste aux outrages du temps. Dégustation de produits frais et du terroir servie par la patronne, au caractère trempé comme ses plats ! Demandez une table en terrasse (couverte) qui surplombe le marais, la vue est splendide et soyez patients les jours d’affluence.

La Ferme des Colombos • Cette boutique à la ferme de Bouquelon vend ses produits laitiers de chèvre et de vache. Vous trouverez aussi de la viande, des volailles, du cidre, du miel. Un bon aperçu du terroir normand pour un pique-nique champêtre.

Les hébergements

Aux Cigognes du Marais • Cette chaumière propose 4 chambres d’hôtes spacieuses dont un POD (construction insolite en bois), avec spa. Location à la journée de tout type de vélos + remorques. Un cadre idéal pour la rando et l’accès à la réserve.

Le Gîte de l’ânerie • Maison traditionnelle du 18e siècle, restaurée avec des matériaux locaux et écologiques. La grande terrasse donne sur une nature à perte de vue. 7 pers. Balade avec ânes possible.


Pour en savoir +

Une réserve naturelle : Kezako ? C’est un territoire protégé par une règlementation ministérielle. Elle concerne les espaces, espèces et objets géologiques rares ou caractéristiques ainsi que les milieux représentatifs de la biodiversité en France. Au-delà de cette protection juridique, la connaissance, la gestion et la découverte font partie de ses trois autres missions. Ce qui la protège de toute intervention artificielle néfaste et implique d’éventuelles mesures de réhabilitation écologique.


Ressources documentaires : Réserves Naturelles de France, PNR des Boucles de la Seine Normande, Département de l’Eure, Conservatoire du Littoral.


Escapade dans le MARAIS VERNIER, une réserve naturelle normande | ©VOYAGEONS AUTREMENT
Par Aurèle Ricard
Parisienne pour une belle tranche de vie, je suis installée (avec bonheur) sur la côte d'Albâtre depuis 2012. Mon parcours professionnel oscille entre vocation et opportunités : le chant, l'édition, le journalisme, la formation en milieu scolaire et l'accompagnement touristique et culturel. Je partage le temps qu'il me reste entre les voyages, la découverte du patrimoine régional, de la faune et de la flore sauvages et l'attention portée aux animaux. Les bains, le vélo, la rando, la radio et les arts sont mes nourritures célestes que j'apprécie d'autant plus quand je peux les partager... Enfin, j'ai à coeur de défendre ce qui m'anime, à savoir les droits des plus vulnérables et militer pour un monde plus écologique...
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2 réponses à Escapade dans le MARAIS VERNIER, une réserve naturelle normande

  1. Dumontier a commenté:

    Article fort intéressant qui nous donne des idées précises pour l’organisation de notre prochain passage en Normandie ! Une vraie découverte !!

  2. Valérie Roquier a commenté:

    Vraiment un très bel article, très approfondi, avec du vocabulaire naturaliste tout en étant accessible à tous les lecteurs !

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