L’autre voyage…

Dans son autobiographie « assoiffée de ciel » (éditions Aluna), Suyin Lamour retrace l’étonnant voyage l’ayant conduite jusqu’à cette « expérience » inénarrable que depuis un certain Siddhartha Gautama on appelle l’éveil…

Depuis l’aube des temps, le voyage représente LA métaphore illustrant le mieux la destinée humaine. Les deux plus anciens livres connus, « L’épopée de Gilgamesh » comme « l’Odyssée » d’Homère, sont deux récits initiatiques décrivant les mille péripéties que l’être humain doit accomplir avant de pouvoir rentrer à la « Maison »…

Au regard des incroyables aventures auxquelles est soumis Ulysse, on comprend d’ailleurs rapidement que loin d’être uniquement géographique ou même évènementiel, tout voyage est d’abord intérieur. Il est le creuset dans lequel s’opèrent les transmutations successives guidant nos consciences individuelles sur le chemin de l’évolution. Evolution vers quoi ? Vers Qui ?… C’est précisément parce qu’elles se retrouvent un jour définitivement harponnées par ces questions et le désir impérieux d’y apporter une réponse que des millions de personnes entreprennent une quête spirituelle et, comme on a coutume de le dire, qu’elles s’avancent « sur le chemin ».

Née dans une famille dénuée de toute aspiration transcendantale ou religieuse, mon amie Suyin découvrit en grandissant qu’il existait d’autres réalités que celles perçues par nos yeux… A peine s’était-elle mise en route sur ce chemin que déflagra le coup de tonnerre d’un éveil dit « sauvage ». Un beau soir, alors qu’elle vient de sortir prendre l’air au terme d’une lecture inspirante, voici que pour Suyin le monde s’éclaire d’un coup : le moindre brin d’herbe, le moindre caillou deviennent vivants et toutes les questions du monde connaissent soudain leur réponse dans le seul fait de réaliser quelle EST. Elle est… LA Conscience, atemporelle et universelle !

Suyin se lance alors dans une quête spirituelle effrénée. Quête l’amenant à sillonner les chemins de l’invisible : rêves lucides, voyages astraux et chamaniques, channeling, contact avec les défunts et le monde des esprits, vies antérieures, explorations énergétiques… De gouffres psychiques en prises de conscience jubilatoires, un fabuleux travail de maturation s’opère en elle. Jusqu’à ce qu’épuisée par les aléas de cette recherche et rendant soudain les armes, Suyin parvienne à un état de renoncement dans lequel cette compréhension ultime surgit : nous sommes DEJA « Cela », ce divin que nous poursuivons. Et la seule chose à faire pour y revenir consiste à abandonner définitivement la croyance d’être « quelqu’un » ; quelqu’un qui cherche « Quelque Chose ». Pour simplement accueillir « Ce qui est ».

C’est le grand renversement, l’Apocalypse : Exit Suyin Lamour. Le personnage qui pensait cheminer vers toujours plus de conscience cède définitivement la place à LA Conscience qui se souvient (enfin !) avoir choisi de s’expérimenter à travers un personnage.

C’est aujourd’hui depuis cette Source, depuis LE Tout, que Suyin poursuit son incroyable voyage. Car l’éveil n’est qu’une étape. Merveilleux paradoxe : c’est dans cette vie ordinaire qu’elle a si longtemps fui pour accéder au divin que Suyin jouit désormais pleinement de sa divinité. Ou plutôt que le divin jouit pleinement, en Suyin, de son humanité !