Jean-Louis Carli, photographe de l’Ici et de l’Ailleurs
Derrière le superbe portfolio qui illustre notre dossier Djibouti se cache un jeune photographe en devenir. A travers nos questions se révèlent ses propres questionnements, des incertitudes décalées gage d’un chemin que l’on pressent riche et original. Rencontre avec Jean Louis Carli, un passionné d’art sous toutes ses formes.
VA/ Pourquoi avoir choisi la photographie pour vous exprimer ?
Bonne question. Ça doit être un juste milieu entre le déterminisme et les passions « aléatoires » (j’aime bien les aléas). J’ai toujours été un peu entre-deux, 1ère L ou S, sociologie ou « commerce », reportage ou mise en scène, etc. Avec un peu de mal à prendre parti. A côté de ça, mon père m’a offert son premier reflex (le mien aussi du coup), et, au-delà de l’appareil, c’était des moments avec lui que son travail n’offrait pas beaucoup. Et le mode d’emploi, bien conservé, était carrément un manuel ! J’ai pris l’appareil photo, l’ai abandonné, puis repris…
J’ai commencé par les enfants dans les parcs. Puis les fleurs, puisqu’on les trouve au même endroit. Ensuite, je suis parti au Mexique pendant une année, où j’ai pu prendre le voyage « au sérieux ». Avec l’appareil photo et mon côté aussi distant que social (tout un concept…), j’ai réalisé la multiplicité des rencontres que cela me permettait. Réalisé que le voyage, c’est aussi dans le quartier d’à côté.
J’aime l’image, l’esthétisme pour la sensibilité et la porte d’entrée qu’elle représente. Sans pour autant oublier le fond, une histoire ou un ressenti. La fameuse histoire de nos deux cerveaux. Gauche/Droit, Animal/Conscient, etc. Pourquoi la photo plutôt que la vidéo ou les parfums ? Ca doit être là, le mélange du déterminisme et des opportunités de la vie. Puis ça doit m’aider à continuer à plaire à ma femme. Encore que la vidéo ça marcherait aussi. Tiens d’ailleurs, je ferais bien de la vidéo aussi.
VA/ Des modèles ? Des inspirations ? Des rejets ?
Des modèles…? Des héros, des mecs simples, des narcissiques, des flemmards plein de talent, des bosseurs ? Oui, j’en ai plein. « Modèles », je ne sais pas : on a tous les défauts de nos qualités, ceux qu’on admire aussi (encore plus?). Mais tous à leur façon, je les envie. Je prendrais bien un moment de leurs vies de temps en temps. Puis de celles des gens qu’ils photographient, aussi.
Mes icônes, il y a Alex Webb, Saul Leiter ou Harry Gruyaert. Capa, Daido Moriyama, Salgado. Et je ne vous parle pas de Helmut Newton, Guy Bourdin ou Antoine d’Agata. Ou JR. Bref. Là je n’évoque que les plus connus, mais la scène photographique est tellement vaste. Ils sont nombreux à m’impressionner… Et j’ai vraiment l’impression d’oublier mes principaux coups de cœur… Bon, j’ai cité Alex Webb et Guy Bourdin, c’est déjà ça.
Tout m’inspire. Récemment, c’était Jan Fabre et son « Power of Theatrical Madness ». Rien que la « bande-annonce » et j’étais parti pour une page de mon carnet. Alors après les 4h du spectacle…
VA/ Vous arrive-t-il d’oublier votre appareil photo ?
Oui, souvent. Je le regrette d’ailleurs. Mais quel soulagement de temps en temps, entre le poids, les frustrations et le temps qu’implique la photographie comme je l’aime… Ça permet de profiter d’autre chose aussi, d’ouvrir les yeux différemment. Avec un peu de musique sur les oreilles, la ville devient alors une source d’inspiration bien rythmée. Et depuis que j’ai un iPhone, j’ai un autre outil sur moi presque en permanence : je ne suis franchement pas sectaire.
VA/ Voyager-autrement ! Ce serait quoi pour vous ?
La liberté de pouvoir aller et venir, rester ou partir. Je prends « toujours » 4-5 semaines minimum pour voyager, cela me laisse de la liberté bien que « tout voir » ne m’intéresse pas forcément. Mais il y a toujours des sujets qui prendraient bien ce temps-là à eux seuls, puis il faut pouvoir se nourrir…
Le voyage, par exemple, c’est rencontrer quelqu’un qui part et décider de le suivre du jour au lendemain. Et ça fonctionne tout autant que la personne voyage en jet ou en bus déglingué. Ou tout seul en stop d’ailleurs. Ou en avion, se retrouver paumé au bout du monde après l’équivalent d’une nuit de sommeil. Le voyage, c’est autant la route que la destination, c’est autant vers soi que vers les autres, bref, il n’y a pas UNE façon de voyager et puis, après tout, qui suis-je pour juger… Il y a bien des choses que je ne comprends pas, hein, mais bon… si je fais la liste des miennes déjà…
VA/ Si vous étiez un pays ?
Mexico, sans aucun doute ! Tiens, pour une fois. Disons que ça m’a marqué, que j’y suis retourné. 15 mois en deux fois. J’ai l’impression que là-bas, ma façon de voyager prend tout son sens : si l’on donne, à un moment on va recevoir. Et les mexicains savent donner…
VA/ Et si vous n’étiez pas photographe ?
Consultant, à la rue, va savoir… Ce que j’adorerais vraiment faire, c’est travailler pour mettre l’Art dans la rue. En photographe ou mécène, peu importe. J’admire le travail de JR à ce niveau-là notamment. Il y a beaucoup à faire aussi avec toutes les organisations de nos sociétés et leurs membres. Nous, d’une façon ou d’une autre. Mais en fait, je fais déjà deux-trois choses en plus… J’espère que ça prendra un sens public dans un moment…
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Par Geneviève Clastres
Auteur et journaliste indépendante spécialisée sur le tourisme durable et le monde chinois, Geneviève Clastres est également interprète et représentante de l'artiste chinois Li Kunwu. Collaborations régulières : Radio France, Voyageons-Autrement.com, Monde Diplomatique, Guide vert Michelin, TV5Monde, etc. Dernier ouvrage "Dix ans de tourisme durable". Conférences et cours réguliers sur le tourisme durable pour de nombreuses universités et écoles.
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