#TourismeDurable
montagnes Style Hokusai

Il faut sauver les colonies de vacances !

| Publié le 28 novembre 2020
             

C’est une édition tout à fait particulière du colloque #VacancesEnfantsAdos qui a rassemblé près de 270 membres de L’Union Nationale des Associations de Tourisme et de plein air (UNAT) autour d’un webinaire passionnant le jeudi 26 novembre. Alors que la crise affecte fortement l’ensemble des membres, l’accent a été mis sur tous les aspects constructifs que ces épreuves ont révélé soit l’adaptabilité de chacun à la crise mais aussi l’envie de se saisir des enseignements de ces temps compliqués pour rebondir plus avant. Une matinée qui restera aussi marquée par l’intervention brillante de Christophe Sempels sur les modèles économiques innovants axés sur le durable et le social et l’allocution finale de Sarah EL HAÏRY, Secrétaire d’État auprès du Ministre de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports, qui a réitéré tout son soutien à l’UNAT dans un discours profondément humain.  

Jeunes enfants en colonies de vacances, côte à côte

Des colos à toute épreuve !

2020 restera forcément une année noire pour un réseau qui organise colonies de vacances, classes de découvertes et séjours scolaires. Une année qui aura toutefois permis d’éprouver les capacités de résistance voir de résilience des membres de l’UNAT, autant de défis sociaux, sanitaires, pédagogiques, économiques relevés par les adhérents et salués par Michelle Demessine, sa présidente, dans son discours d’ouverture. « Je ne vous dirai pas que tout ira bien, les prochains mois seront forcément difficiles, mais nous avons réussi à relever ces défis. ». Référente Vacances Enfants Ados, Louise Fénelon Michon a aussi rappelé qu’en dépit des mois d’incertitude dû au confinement et d’un feu vert tardif pour les colos de l’été, près de 450 000 enfants et ados ont pu être accueillis, dont beaucoup de primo partants, saluant ainsi le succès des vacances apprenantes et la capacité des organisateurs de séjour à se réinventer et à s’adapter à des contraintes aussi diverse que les reports de séjours, changements de lieux, protocoles sanitaires compliqués et tardifs, le travail en visio, la préhension des dispositifs d’aide, un véritable parcours du combattant dans un climat anxiogène d’incertitude. « Bien sûr, les vacances apprenantes  ne compensent pas tout mais elle sont une marque de reconnaissance et de soutien. »

Des modèles à faire évoluer ? 

Et parce que les périodes difficiles et compliquées sont aussi des moments qui questionnent et permettent de réfléchir à la capacité d’adaptation d’un réseau aussi essentiel que celui des séjours collectifs et éducatifs, l’UNAT avait saisi l’opportunité de ce colloque pour inviter Christophe Sempels, spécialiste dans les modèles économiques durables et innovants, afin qu’il apporte un éclairage sur les évolutions possibles à adapter au secteur des colonies de vacance. Quand nombre d’asiatiques ont grandi en écoutant l’histoire de « saiwongsima » où un malheur entraine toujours un bonheur ; Christophe Sempels interroge la crise pour en faire un temps d’opportunité pour sonder les modèles économiques et les rendre plus efficients*. Parmi les mots clés de sa présentation, la raison d’être d’un projet, son efficience sociale mais aussi, des exemples parlants où l’on saisit combien les modèles économiques perdent souvent de vue leur raison d’être au profit d’une rentabilité décorrélée de l’objectif final.

Colo apprenantes et jeux d'échec

Quelques exemples enthousiasmants

Concrètement, de citer le cas du mal logement des personnels saisonniers en Nouvelle Aquitaine dû à un parc privé trop cher qui a finalement été résolu par une cartographie des ressources utiles et l’observation que les écoles ne sont occupées que 18,5% du temps en moyenne, les internats 67%, libérant des vacances et de la ressource qui ont permis de signer des contrats triparties entre les établissements, les conseils départementaux et les personnels saisonniers. Autre exemple, celui de la ville de Stockholm qui a identifié les calories émises par 250 000 personnes traversant quotidiennement sa gare comme une source de chaleur réutilisée pour produire  25% des besoins en énergie de l’immeuble d’en face. Un dernier exemple enfin, centré sur des ressources plus immatérielles, a démontré que la connaissance et la coopération peuvent faire naitre de magnifiques idées. Et Christophe Sempels de conter ce projet réalisé par un scientifique expert de l’abeille et un entrepreneur dont « la raison d’être » était de régénérer les colonies d’abeilles et qui,  s’apercevant que la vente du miel ne produirait que 400 € de ressources annuelles, ont eu l’idée revenir à la fonction première de l’abeille, ouvrière du miel mais aussi « coffre à pollen », et ont ainsi mis en lumière un autre « utilité sociale » de l’abeille qui, via le pollen, peut fournir 500 données sur la qualité environnemental d’un site. Autant de donnés immatérielles et d’informations qui ont intéressé des minéraliers obligés de vérifier l’absence de contamination de leur zone d’exploitation pour se conclure par un accord entre les parties où l’efficience du modèle économique a là été multiplié par dix.

L'abeille Noire photo prise par Thierry_Vezon
L’abeille Noire © Thierry_Vezon

Toujours et encore se réinventer !

Pour les adhérents de l’UNAT, pris au cœur de la tourmente, l’intervention de Christophe Sempels a forcément eu une grande résonnance. Simon Thirot, son délégué général, a ainsi rappelé que ces exemples sont autant de pistes pour regarder différemment son organisation, se questionner sur  nos intentions et les valeurs que l’on souhaite créer, précisant d’ailleurs que la polyactivité qui permet d’accueillir des colonies l’été mais aussi des groupes ou des classes de découverte à d’autres moments de l’année est déjà une première réponse du secteur. Et de fait, l’année 2020 a vraiment été l’occasion pour les organisateurs de séjour d’éprouver leur adaptabilité et leur capacité à se réinventer. Une table ronde a d’ailleurs suivi visant à illustrer comment ces derniers se sont adaptés à la crise. Directeur des PEP Alsace, Benoit Haeberle a rouvert dès l’été ses centres de vacances, faisant le choix de se recentrer sur des séjours en pleine nature au cœur d’un même lieu, réinvestissant les espaces autour du centre au vu des contraintes imposées sur les sorties compliquées. Coordinateur chez Calypso, Morgan Logerais a également repositionné l’ensemble de ses séjours sur la France, visant le grand air, la campagne, la mer, la montagne, avec la volonté de faire en sorte que les enfants se retrouvent et redécouvrent le plaisir de la vie en collectivité. « On a demandé aux directeurs de séjour de penser les activités différemment, avec un travail en sous groupes, des jeux extérieurs, et le renforcement des échange. On leur a aussi demandé de prendre cela comme une opportunité pour retrouver l’esprit des colos d’avant. »

Des colos plus que jamais plébiscitées !

Et alors que la crise du Covid aurait pu fragiliser les envies de départ, deux enquêtes de l’OVLEJ réalisées au printemps dernier par Natacha Ducatez ont montré que 70% des parents qui avaient fait le projet d’envoyer leurs enfants en colo étaient toujours prêts à les inscrire, mettant entre autres en avant l’importance de la sociabilisation. Cela a certes été plus difficile pour les publics plus précaires, plus fragilisés par la crise, mais le dispositif des colonies apprenantes a malgré tout permis à nombre de primo partants de découvrir les colos. Frédéric Costa, médecin conseil de la CCAS, a confirmé en ce sens que l’ensemble des séjours de l’été s’était bien déroulés, avec des enfants responsables et des équipes très créatives. En outre, la contrainte sanitaire a permis de freiner une certaine surenchère des colonies allant toujours plus vers des animations marchandes. Benoit Haeberle : « Nous sommes revenus à quelques fondamentaux des séjours de vacances alors qu’on est trop souvent sur une consommation d’activités qui induit une charge et un stress dans les journées des enfants. J’espère que ce côté positif pourra se prolonger. » Morgan Logerais : « On a vraiment envie de revenir à des choses plus terre à terre, de prendre le temps, faire des cabanes, grimper aux arbres, il faut de l’activité mais des contenus pédagogiques simplifiés. Le travail en sous-groupe nous a aussi beaucoup inspiré. Suite à cette période on ressort grandi et différent dans nos pratiques. »

Et demain ?

Alors même que le webinaire était en cours, les membres de l’UNAT ont appris que le Premier Ministre venait d’annoncer que les centres de vacances seraient fermés à noël. Un nouveau coup dur…. et ce, d’autant que toutes les colos qui ont pu avoir lieu pendant l’été puis la Toussaint n’ont fait que limiter la casse, la plupart des acteurs du séjour se préparant à une nouvelle année noire en 2021. En ce sens, l’allocution finale de Sarah EL HAÏRY, Secrétaire d’État auprès du Ministre de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports, est arrivée à point nommé pour remettre un peu de baume au cœur aux adhérents de l’UNAT, réitérant sa confiance et son soutien indéfectible au réseau : « Je réitère tous mes soutiens, qui se traduiront par des mots et des actes que nous écrirons ensemble ». Elle a notamment salué la créativité de l’UNAT qui a permis d’engendrer un fond de 15 millions d’euros pour soutenir les associations organisatrices de colo. Elle a également précisé quelques pistes qui se dessinent, notamment avec la Caisse des Dépôt et France Active : faire passer de 75 à 225 millions d’euros le fonds Tourisme Social Investissement dans le cadre du plan Tourisme pour Tous pour accompagner la transformation du secteur,  faire en sorte que ce fond soit utile et réponde à l’urgence et notamment aux besoins de trésoreries des structures, faciliter les démarches et simplifier les procédures notamment en regard du code APE qui ne sera plus le critère déclencheur de l’aide, pérenniser les Vacances apprenantes, etc. Avec en conclusion ce message fort : « Vous pouvez compter sur moi. Ce n’est pas un sujet parmi d’autres. Il construit les chemins de citoyenneté, on en a plus que jamais besoin en ces temps. Mon soutien sera indéfectible. Je vous redonne rendez vous, dès le début de l’an prochain, pour relever tous les défis que nous portons pour les familles et les enfants. Vous êtes dans mon esprit et dans le travail du cabinet au quotidien. » Un volontarisme qui aidera aussi, on l’espère, à obtenir des garanties pour la prolongation du chômage partiel au-delà du 31 décembre. C’est aussi l’avenir des colonies de vacances et de la sociabilisation de nos enfants qui se joue là.

——– Aller plus loin————–

Pour en savoir plus sur ces modèles économiques tournés vers le durable et l’efficient socialement, découvrir aussi la bande-dessinée « Modèle Economique » de Christophe Sempels que nous chroniquerons prochainement : https://www.lumia-edu.fr/actualites/

Colonies de vacances « apprenantes »

Le saviez vous ? L’UNAT fête cette année ses 100 ANS !

Consultez la Feuille de Chou réalisée pour l’occasion en cliquant sur l’image ci-dessous

La feuille de chou spéciale UNAT : 100 ANS d'histoire de l'Union Nationale des associations de tourisme et de plein air

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Il faut sauver les colonies de vacances ! | ©VOYAGEONS AUTREMENT
Par Geneviève Clastres
Auteur et journaliste indépendante spécialisée sur le tourisme durable et le monde chinois, Geneviève Clastres est également interprète et représentante de l'artiste chinois Li Kunwu. Collaborations régulières : Voyageons-Autrement.com, Monde Diplomatique, Guide vert Michelin, TV5Monde, etc. Dernier ouvrage "Dix ans de tourisme durable". Conférences et cours réguliers sur le tourisme durable pour de nombreuses universités et écoles.
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