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Japon, Îles Féroé, Norvège… faut-il boycotter les pays pratiquant la chasse à la baleine ?

Il est de ces traditions centenaires dont certains peuples peinent à se défaire, même si leur utilité s’est estompée avec le temps et que les mœurs d’aujourd’hui les rendent archaïques… C’est le cas dans certains pays du globe, comme le Japon, les Îles Féroé, la Norvège ou encore l’Islande. Pourtant interdite à l’échelle internationale par un moratoire de 1982, la chasse commerciale à la baleine est pratiquée dans les pays précédemment cités, du simple fait de leur refus de signer ce même moratoire. Notre conscience de voyageur responsable pourrait-elle nous pousser à ne plus vouloir visiter ces pays tueurs de baleines ?

La protection des baleines, un combat mondial historiquement rejeté par certains pays… © Dennis Larsen

Un débat sans cesse relancé

Alors que Paul Watson est resté enfermé cinq mois dans la prison de Nuuk au Groenland avant que le Danemark décide finalement de ne pas l’extrader vers le Japon, le débat sur la chasse à la baleine revient sur le devant de la scène. Non-respect des traités internationaux, défense des traditions, débat sur le bien-être animal, rappel du besoin de conservation des espèces, etc. Défenseurs de cette pêche ancestrale VS protecteurs de l’environnent, pays opposés à la chasse VS pays partisans, tous s’affrontent dans une drôle de cacophonie, tandis que sous l’eau, en silence, des milliers de baleines s’apprêtent à subir la violence des harpons.

Dans un essai retraçant l’historique de la Convention internationale pour la réglementation de la chasse à la baleine, la professeure de droit Malgosia Fitzmaurice résume ainsi la situation : « Pour le petit nombre de nations baleinières qui subsistent, la chasse à la baleine, bien qu’elle doive aujourd’hui être contrôlée et durable, reste une activité légitime au même titre que d’autres formes d’exploitation durable des ressources marines. Cependant, pour la majorité écrasante de pays qui ne pratiquent pas la chasse à la baleine, soutenus avec force par le puissant lobby des organisations non gouvernementales environnementales et préservationnistes, ainsi que par une grande partie de l’opinion publique, la chasse à la baleine sous toutes ses formes est considérée comme une activité inutile et même immorale qui devrait, à terme, être définitivement interdite. » *

Le grindadráp, une chasse à la baleine pratiquée aux Îles Féroé et source d’indignation à travers le monde.

Les arguments en faveur de la continuité d’une chasse commerciale (parfois maquillée sous les traits de « recherche scientifique », comme l’a fait le Japon pendant des années) restent les mêmes en Norvège, Islande, Japon et Îles Féroé – qui appartiennent au royaume du Danemark : il s’agit d’une tradition ancestrale, « noble », qui permet de nourrir les populations locales et respecte les quotas liés à la préservation d’espèces pourtant gravement menacées. Là où le bas blesse, c’est que ces pays s’arrogent le droit de ne pas respecter des lois internationales, qui font pourtant (presque) l’unanimité. « Je ne veux pas, donc je ne signe pas » : une excuse qui peut dérouter…

Par ailleurs, la chasse aux cétacés pose différents problèmes : aujourd’hui, ces animaux sont devenus quasiment impropres à la consommation. Surchargés de mercure, leur chair est à la limite de la toxicité pour l’homme. Drôle d’idée que d’aller pêcher des animaux « empoisonnés » quand il existe tant d’autres moyens de subsistance. Enfin, et c’est souvent le point qui met d’accord les populations, la chasse à la baleine est une pratique infiniment cruelle. Les cétacés, de par leur taille, ne peuvent être abattus en l’espace de quelques secondes. Leur agonie durent a minima de longues minutes, voire plusieurs heures selon l’Agence gouvernementale islandaise chargée d’assurer leur respect du bien-être animal lors de ces « parties de chasses ». Sans oublier des pratiques comme celle du grindadráp, aux Îles Féroé, qui consiste à pousser sur la côte des groupes de mammifères marins, le plus souvent des globicéphales en migration, avant de les abattre un à un dans un bain de sang effroyable. Stress, panique, douleur, agonie, les animaux subissent une fin terrible… au nom de la tradition.

Tourisme responsable et chasse baleinière sont-ils compatibles ?

Visiter un pays étranger, c’est, quelque part, le cautionner. De ce fait, prendre un billet pour l’Islande, la Norvège ou le Japon fait-il du voyageur un défenseur passif de la chasse à la baleine ? L’incarcération de Paul Watson, qui s’est achevée le mardi 17 décembre, a donné naissance à un déferlement de hashtags comme #boycottjapan ou #boycottdenmark sur les réseaux sociaux. Des encouragements au boycott qui concernent aussi bien les produits importés depuis les pays en question, que le fait de s’y rendre.

La Norvège, un pays engagé en faveur de l’environnement.

Or, boycotter un pays à titre personnel relève davantage du choix moral. Il semble en effet difficile de chiffrer ces implications personnelles à l’échelle globale, et de ce fait, leur efficacité concrète. L’Islande, la Norvège ou encore le Japon sont des pays magnifiques, culturellement et naturellement riches, qui peuvent attirer à bien des égards. L’Islande et la Norvège, riches d’atouts géographiques et géologiques uniques, sont par exemple de vrais fers de lance en matière de transition énergétique à l’échelle européenne

Dénoncer les pratiques de ces pays en matière de chasse baleinière est légitime. Faire libérer Paul Watson le fut tout autant. Essayer, à son échelle, de faire évoluer les mentalités est parfaitement louable – cela commence parfois tout simplement par le fait d’en parler autour de soi afin d’éveiller les consciences. Savoir, c’est pouvoir… Mais c’est également savoir qu’en France, en 2024, la pratique de la corrida ou la tradition du foie-gras persistent, qu’en Espagne, pendre des galgos (chiens de chasse) est monnaie courante, qu’au Danemark ou aux Pays-Bas, l’élevage de visons dans des conditions épouvantables est légal, ou encore qu’en Chine, les ours à bile continuent de souffrir le martyr… Sans oublier les milliards d’animaux d’élevage et de poissons tués chaque année pour leur viande.

La corrida avec mise à mort du taureau reste un « spectacle » autorisé en France, sous couvert de tradition…

La protection des animaux doit être globalisée. Cibler un pays spécifique, qui pratique tel type de souffrance sur tel type d’animaux, ne doit pas occulter tout ce qui se passe ailleurs, à commencer par chez soi.

Etre un touriste responsable en 2024, c’est avant tout savoir où l’on met les pieds, pour ensuite pouvoir choisir sa destination en son âme et conscience.

*United Nations Audiovisual Library of International Law, Convention internationale pour la réglementation de la chasse à la baleine, Malgosia Fitzmaurice, Professeure de droit international public Faculté de droit Queen Mary University of London.


Japon, Îles Féroé, Norvège… faut-il boycotter les pays pratiquant la chasse à la baleine ? | ©VOYAGEONS AUTREMENT
Par Mélusine Lau

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