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Vallées préservées et savoirs agricoles ancestraux dans le Tyrol autrichien

| Publié le 25 octobre 2018
Thèmatique :  Routes du Monde   Territoire 
             

Au coeur des Alpes autrichiennes se trouvent les petites vallées de Schmirntal et Valsertal où le temps semble s’être arrêté pour le plus grand bonheur de visiteurs désireux d’un certain retour aux sources. Le village de Sankt Jodok, situé dans le Wipptal entre Innsbrück et la frontière italienne, est la porte d’entrée de ces deux joyaux du Tyrol du Nord. Ici, pas de constructions démesurées mais des villages à taille humaine et une architecture de montagne préservée. Des paysages de toute beauté sont maintenus avec des techniques agricoles traditionnelles, grâce aux efforts d’une poignée de personnes passionnées. Rencontre avec ces acteurs locaux qui unissent leurs compétences pour transmettre leur savoir et ainsi préserver des écosystèmes fragiles.

Helga Hager, femme aux multiples casquettes. @vanessabeucher

Le Tyrol est une région alpine de l’Europe centrale, qui s’étend sur une partie de l’Autriche, et son voisin avec lequel elle entretient de nombreux liens est la province de l’Alto Adige en Italie. L’axe de communication entre Brennero à la frontière italienne et Innsbrück est emprunté depuis plusieurs siècles du fait de la faible altitude de col de Brenner. Le Tyrol est l’un des endroits des Alpes les plus réputés pour ses nombreuses stations de ski telles que Kitzbühel et Sölden pour ne citer que celles-ci. Mais dès que l’on s’enfonce dans la vallée de Valsertal après le petit village de Sankt Jodok, aucune remontée mécanique ni aménagement de la montagne en vue: des fermes traditionnelles parsèment des prés d’un vert tendre et la forêt s’étend à perte de vue. Depuis peu, Sankt Jodok a acquis le label de ‘village d’alpinisme’. Ce statut est le résultat d’une initiative très intéressante de la Convention Alpine, traité international ratifié par les huit pays alpins et l’Union Européenne. L’objectif principal de cet accord est un développement durable de l’ensemble de l’arc alpin. Depuis des décennies, trop de communes se sont développées selon un tourisme d’hiver technicisé, aplanissant des pans de montagnes entiers, construisant des téléphériques, creusant des lacs de retenues, érigeant des hôtels massifs. La population locale a de ce fait été entraînée dans un cercle vicieux d’aménagement excessif du territoire pour répondre aux besoins d’un tourisme de masse. A contrario, des villages d’alpinisme comme Sankt Jodok développent des activités douces, telles que le ski de randonnée ou les raquettes en hiver, le vélo, l’escalade et la marche en été… Les possibilités sont nombreuses selon l’époque de l’année et chaque saison a son intérêt particulier. De plus, la vallée fait partie depuis 2001 du réseau ‘Natura 2000’ et la réserve naturelle du Valsertal couvre tous les étagements de la végétation, de l’étage montagnard à l’étage nival, abritant une incroyable biodiversité de 420 espèces animales et végétales. Ces communes ont volontairement fait le choix de s’orienter vers un autre type de développement et une véritable symbiose se crée alors entre les touristes et la vallée: des emplois peuvent être maintenus dans les communes, des réservations pour des nuitées en refuges et auberges se multiplient, les délicieuses spécialités culinaires régionales trouvent des amateurs…

Le décor bucolique de la vallée de Valsertal. @vanessabeucher

Helga Hager est une femme qui ne laisse pas indifférent à la première rencontre. Elle dégage une énergie contagieuse et vous captive de son regard vif, s’exprimant sans détours. C’est une personne aux multiples casquettes, qui jongle entre plusieurs vies, à la fois éleveuse de chèvres et productrice de fromage, guide de randonnée et sommelière émérite. Nous la retrouvons dans son alpage, au fond de la vallée de Valsertal, dans un cadre sublime de forêts noyées dans la brume. Les pans de bois de ferme familiale portent les marques et striures du temps, on se sent replongés plusieurs décennies ou même siècles en arrière. L’intérieur est sobre et décoré de vieux objets, dégageant une atmosphère de sérénité. Autour d’un café, elle nous raconte son parcours de vie et le temps semble se ralentir pour un moment… Helga est originaire de la vallée de Valsertal et très attachée à cet endroit. Passionnée de vin, elle quitte la vallée à l’âge de 22 ans et devient sommelière à une époque de sa vie, travaillant la saison d’hiver dans un hôtel de Kitzbühel. A l’approche de la cinquantaine, elle veut donner une nouvelle impulsion à son existence: elle n’abandonne pas pour autant son métier d’experte en vin mais passe une formation de guide de randonnée. Puis elle décide de reprendre en été la ferme qui appartient à la famille depuis six générations et se lance dans un projet d’élevage de chèvres. Elle débute avec cinq animaux et entretient immédiatement une relation très fusionnelle avec elles. Son troupeau s’est maintenant élargi à 22 chèvres dont un mâle. En 2012, elle décide de construire une fromagerie et développe au fur et à mesure son activité. Ce processus s’est fait tout seul, elle a simplement suivi son instinct et s’en réjouit maintenant. Elle est heureuse de ce nouvel équilibre dans sa vie: gardienne des alpages et productrice de fromage de chèvre l’été et sommelière l’hiver. Elle dispose également d’un moulin pour faire ses céréales et de son propre potager pour cultiver ses légumes, désirant avoir un certain degré d’autonomie et une production aussi saine et respectueuse de l’environnement que possible. Comme l’affirme si bien Helga elle-même, ‘une vie simple est une vie facile malgré le dur labeur que cela implique.’

Alois Gatt montre comment construire une clôture de façon traditionnelle. @vanessabeucher

Une autre étape importante dans la vie d’Helga a eu lieu trois ans auparavant en 2015 lorsque Werner Kräutler fonde la Schule der Alm ou l’Ecole des Alpages, dans le but de maintenir et de transmettre le patrimoine culturel ancestral des pratiques agricoles de la vallée. L’idée est de proposer des initiations aux tâches des fermiers montagnards des hautes vallées du Wipptal, telles que couper le foin manuellement, ériger une clôture en bois sans clou ni vis, cueillir des herbes sauvages médicinales, effectuer la traite des animaux… On peut ainsi participer activement à la vie et au travail dans les alpages. Cette forme de tourisme actif bénéficie ainsi à tout le monde: aux participants qui s’échappent d’un quotidien parfois aux antipodes et apprécient le côté manuel des tâches qu’ils ont à accomplir, à Helga qui allège ainsi sa lourde charge de travail et tout simplement à l’environnement, révélant ainsi l’importance des techniques traditionnelles dans la préservation des écosystèmes de montagne. L’école a accueilli cette année une quarantaine de personnes venant principalement d’Autriche, d’Allemagne et même de l’étranger. Ces personnes de tout âge et et de tout horizon social restent en moyenne un minimum de quatre jours et séjournent parfois plus longtemps. De ce fait, il y a quasi en permanence au minimum une personne pour aider Helga dans son travail. Un bon nombre d’entre elles revient d’année en année, enchantées par les lieux et les liens tissés avec les différents acteurs du projet. Car au-delà d’Helga, on peut aussi citer Alois Gatt -homme au grand savoir et expert en montage de clôtures de bois-, Elli Mayr -spécialiste en plantes médicinales-, Klaus Auffinger -accompagnateur en montagne qui connaît les moindres recoins de la vallée-, Erich Gatt -un véritable artiste qui a construit de ses propres mains une chapelle en pierre et de nombreuses sculptures aux formes originales dans la montagne au-dessus de la ferme d’Helga-…

De nombreux sentiers permettent de contempler des vues superbes sur la vallée. @vanessabeucher

Ces quelques jours passés dans ces deux petites vallées latérales au Wipptal permettent de constater avec bonheur qu’il existe encore des zones de montagne préservées sans pour autant être désertées ou en train de dépérir, développant une forme d’économie plus solidaire et durable. Des personnes en quête d’un tourisme au grand air à taille humaine peuvent y trouver de nombreuses activités selon les saisons de l’année, qui révèlent chacune à leur manière la beauté des paysages du Tyrol autrichien. De plus, dans une époque où les réflexions sur les pratiques environnementales dans le quotidien de chacun sont plus cruciales que jamais, des initiatives comme celle de l’Ecole des Alpages sont pleinement porteuses d’espoir. On espère que ce n’est que le début d’une riche aventure humaine et écologique…

Elli Mayr transmet aux visiteurs son savoir en plantes médicinales. @vanessabeucher

LIENS UTILES :

.Helga Hager : site : www.helgasalm.at / mail : helga@helgasalm.at

.Die Schule der Alm : www.schulederalm.at

.Où rester à Sankt Jodok : Hôtel d’alpinisme et restaurant ‘Das Lamm’ chez Petra & Patrick Zwölfer : site : www.das-lamm.at / mail : hotel@das-lamm.at

.Activités de montagne : www.alpenvereinaktiv.com

Un grand merci à l’Office du Tourisme du Tyrol : www.tyrol.com

 


Vallées préservées et savoirs agricoles ancestraux dans le Tyrol autrichien | ©VOYAGEONS AUTREMENT
Par Vanessa Beucher
Photographe, journaliste & traductrice basée à la Grave dans le massif des Ecrins
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Une réponse à Vallées préservées et savoirs agricoles ancestraux dans le Tyrol autrichien

  1. voinson a commenté:

    Tout cela donne envie de vivre autrement

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