Rencontre avec Dalia Hammad, membre de la Société royale jordanienne pour la Conservation de la Nature
La RSCN, Société royale jordanienne pour la conservation de la nature est une ONG jordanienne indépendante qui se consacre à la conservation des ressources naturelles du pays. Sous le haut patronage de sa majesté la reine Noor, la RSCN a été fondée en 1966 avec pour président honoraire sa majesté le roi Hussein de Jordanie. Elle a pour mission de protéger et de gérer les ressources naturelles du pays ainsi que la faune et la flore endémique. Etant l’une des rares organisations du Moyen-Orient à posséder un tel mandat, nous avons pensé qu’il serait intéressant de rencontrer l’un de ses membres. Dalia a très aimablement accepté de répondre à nos questions…
VA/Quel est le rôle et la fonction de la RSCN sur le territoire jordanien ?
D’ores et déjà, il faut préciser que les travaux de conservation et de protection de la nature que nous menons nous ont très tôt valu la reconnaissance des instances internationales. En Jordanie, la gestion des ressources naturelles s’est traduit par la mise en place de zones protégées afin de sauvegarder la faune, la flore, et les ressources paysagères tout en encourageant la reproduction des espèces en voie de disparition pour prévenir leur extinction. Nous veillons également au respect des lois gouvernementales qui protègent la vie sauvage et combattent la contrebande. Nous développons des programmes éducatifs afin de sensibiliser le grand public et les scolaires aux questions environnementales. Enfin, nous faisons très attention à promouvoir un usage raisonné des ressources naturelles.
Bien qu’elle n’existe que depuis 1966, la RSCN a donc déjà une riche histoire. La plus emblématique de ses actions reste toutefois d’avoir mis sur pied sept zones protégées qui couvrent plus de 1 200 km². Ces zones comprennent des plantes endémiques, des animaux sauvages et nombre de ressources naturelles. En outre, elles comptent parmi les plus beaux paysages du pays.
La reproduction et l’élevage en captivité de l’oryx arabe, de la gazelle et du bouquetin qui étaient en danger et leur réintroduction dans la nature est considéré comme une étape primordiale pour les activités de conservation de la région. C’est aussi dans cette optique que nous avons contrôlé la chasse illégale dans l’ensemble du royaume, afin de préserver ces merveilleuses créatures.
Enfin, pour ce qui est de l’éducation, nous avons mis en place plus de 1 000 clubs de Conservation de la Nature dans les écoles, qui attirent l’attention des enfants sur l’importance de préserver leur environnement mais aussi les impliquent dans des activités et projets de conservations.
VA/Quels sont les projets en cours ?
Afin de mener à bien ses missions, la RSCN a donc mis en place et autogéré sept zones protégées à Dana, Wadi Mujib, Azraq, Shaumari, Dibeen, Ajloun, Fifa, Yarmouk et Wadi Rum, qui couvrent 1 200 km² au cœur des plus beaux sites naturels du pays. Dans chacune de ces zones, la RSCN s’attache à sauvegarder l’environnement naturel et la biodiversité. Nous sommes également en train de mettre sur pied une nouvelle réserve naturelle à Burqu. Enfin, trois autres sites (Qatar, Jabal et Masauda) sont désireux d’accueillir de nouvelles réserves dans les années à venir.
En ce qui concerne les programmes de reproduction et d’élevage d’espèces en captivité puis leur réintroduction dans la nature, la RSCN a peu à peu changé ses façons de faire et mis en place de nouvelles méthodes de conservations, qui implique de passer des programmes de conservation axés sur l’espèce à des programmes de conservation axés sur l’habitat.
Nous avons également un mandat spécial du ministère de l’Agriculture qui nous permet de contrôler la mise en application et le respect de la loi sur la Protection de la Faune et de la Flore. Nous travaillons donc en collaboration étroite avec les agents censés faire respecter la loi et protéger la biodiversité comme les Rangers (« police de l’environnement »). La RSCN est également l’autorité désignée pour représenter l’application de la CITES – La Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction.
Nous menons également des recherches pour consolider les bases scientifiques nécessaires au succès des programmes de conservation. La pédagogie et la sensibilisation aux problématiques de l’environnement sont une autre de nos préoccupations. J’ai déjà évoqué les clubs de conservation de la nature que nous mettons en place dans les écoles mais nous avons ainsi nombre de programmes éducatifs qui permettent de parler de la biodiversité et de la faune et de la faune au cours des cursus scolaires.
Enfin, nous mettons sur pied des formations en environnement pour les professionnels ou les différentes institutions intéressées en Jordanie ou au Moyen-Orient afin de partager notre expertise et d’inciter le maximum de personnes à nous rejoindre dans notre mission de protection de la nature. En ce sens, nous encourageons le grand public à s’investir dans les programmes de conversation en devenant membre de la RSCN et nous organisons des évènements à grande échelle pour la protection de l’environnement, via des campagnes ou toutes autres manifestations menées par un comité de volontaires venant de différents secteurs.
VA/Le tourisme peut-il également être un outil pour aider les populations qui vivent dans ces zones protégées ?
La mise en place de vastes programmes de conservation visant à intégrer la protection de l’environnement au développement socio-économique des populations au sein des zones protégées est une autre de nos missions. Dans cette optique, la RSCN a mis sur pied une gamme très variée de programmes écotouristiques et a soutenu la production de l’artisanat local et des produits issus de l’agriculture biologique. Ces différentes actions liées à la protection des zones naturelles permettent d’améliorer les conditions de vie des communautés locales les plus défavorisées. L’ensemble des produits et des entreprises d’écotourisme sont enregistrés sous la marque « Wild Jordan » et la gamme complète des travaux d’artisanat est exposée au Centre « Wild Jordan » à Amman. En outre, nous avons un département Ecotourisme qui met sur pied des circuits responsables.
VA/Dans les sites protégés, le nombre de touristes est-il limité afin de mieux préserver l’environnement ?
En premier lieu, je tiens à préciser que nous faisons très attention à nos zones protégées et nos propres équipes font attention à employer en priorité des guides et rangers locaux. Et effectivement, nous limitons le nombre de visiteurs sur les sites d’autant que tous les sites n’ont pas la capacité d’accueil nécessaire pour accueillir un nombre élevé de touristes.
VA/ Le tourisme peut-il menacer l’équilibre de certains sites ?
Grâce à nos différents programmes d’écotourisme et aux limites que nous avons fixé, les réserves et la faune et flore ne sont pas en danger. En outre, les équipements de la RSCN ont une faible capacité d’accueil (pas plus de 16 chambres souvent), ce qui limite automatiquement le nombre de visiteurs. Concrètement, sur les rives de la mer Morte, nous avons 15 chalets qui peuvent accueillir au maximum 32 personnes. En outre, pour les circuits accompagnés, les participants ne doivent pas être plus de 18. Ces petits groupes permettent d’éviter les dégradations sur l’environnement.
VA/ Enfin, quel site naturel recommanderiez-vous en priorité à un voyageur de passage ?
Cela dépend déjà beaucoup de ses propres intérêts et de la saison. Si c’est un amateur d’aventure, je lui recommanderais la réserve de biosphère Mujib l’été parce qu’il appréciera la part de canyoning et la randonnée au gré de l’eau. C’est l’endroit le plus approprié pour tous ceux qui aiment les aventures inédites. S’il souhaite au contraire se détendre, je lui recommanderais alors le camp de Rummana dans la réserve de biosphère Dana, un camp tout simple, sans électricité, un endroit rêvé pour admirer les étoiles, s’asseoir autour du feu et écouter les histoires des bédouins. Pour les personnes intéressées par l’observation des oiseaux, la réserve de Azraq Wetland est idéale en octobre, novembre, puis de mars à fin mai, au moment de la migration. Nous proposons aussi des safaris pour voir oryxs, autruches, onagres ou faucons dans la réserve sauvage de Shaumari. Afin, les amateurs de forêt et de verdure se régaleront à parcourir la réserve forestière d’Ajloun.
———— ALLER PLUS LOIN ———–
RSCN : http://www.rscn.org.jo/
Office du Tourisme de Jordanie : http://fr.visitjordan.com
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Par Geneviève Clastres
Auteur et journaliste indépendante spécialisée sur le tourisme durable et le monde chinois, Geneviève Clastres est également interprète et représentante de l'artiste chinois Li Kunwu. Collaborations régulières : Radio France, Voyageons-Autrement.com, Monde Diplomatique, Guide vert Michelin, TV5Monde, etc. Dernier ouvrage "Dix ans de tourisme durable". Conférences et cours réguliers sur le tourisme durable pour de nombreuses universités et écoles.
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