Les étudiant(e)s de l’IREST développent trois outils au service des professionnels du tourisme responsable (ATR).
Thèmatique : Acteur associatif Éducation Initiative nationale Innovation
Depuis deux ans, une collaboration entre l’Institut de Recherche et d’Études Supérieures du Tourisme (IREST – Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne) et Agir pour un Tourisme Responsable (ATR) permet à des étudiants de se confronter au terrain en participant notamment à plusieurs évènements marquants rassemblant des professionnels du tourisme durable. Sous la conduite de leurs enseignants, Francesca Cominelli et Frédéric Thomas, ils développent actuellement plusieurs outils visant à améliorer les impacts à destination de ces acteurs engagés.
Une collaboration croisée entre l’IREST et ATR
Depuis des années, l’IREST se détache sur le front du tourisme durable avec des enseignants très engagés et des étudiants très actifs, dont plusieurs ont été lauréats de différents challenge, d’Atout France au New Explorer Challenge (NEC). C’est notamment le cas de Gaëlle Oger, qui a fait le lien entre son ancienne école et l’association ATR où elle occupe désormais le poste de responsable communication. Francesca Cominelli : « Ce projet ATR/IREST est né grâce aux échanges avec Julien Buot (directeur d’ATR) et à l’aide de Gaëlle, qui a renforcé les liens entre ATR et l’IREST et contribué développer des ateliers avec les étudiants en Master pour les mettre en lien avec des professionnels et le terrain.» Un dispositif pédagogique alliant IREST et ATR est alors mis en place. L’idée, combiner des ateliers de terrain en lien avec le tourisme durable avec le cours « Pratiques et indicateurs du développement durable » assuré par Frédéric Thomas.
L’expérience commence à la rentrée 2023 avec une première génération d’étudiants qui participe alors à trois évènements ciblés : l’IFTM Top Resa, les Universités du tourisme durable (9e édition d’’Aix-les-Bains) et la Conférence annuelle de l’association ATR (septembre 2024). Francesca Cominelli : « L’objectif était que les étudiants participent à ces évènements en tant qu’observateurs, avec des outils méthodologiques préparés en amont, pour identifier les acteurs et les enjeux, et qu’ils puissent par la suite proposer des idées pour améliorer le fonctionnement du tourisme durable en France. » Concrètement, la première génération d’étudiants identifie et travaille sur sept outils qui sont proposés aux membres d’ATR. Trois de ces outils sont alors sélectionnés (par vote) par les membres de la commission “impacts à destination” d’ATR, et depuis la rentrée de septembre, une nouvelle génération d’étudiants les développe et améliore tout en continuant le travail de terrain et d’observation. Frédéric Thomas : « Cette année, les ateliers visent principalement à faire en sorte que les étudiants travaillent ensemble et créent des outils qui fonctionnent et puissent être utilisés par les membres d’ATR. »
Trois outils présentés par Maurine, Eloïse et Clémence
→ TouriSieve
Étudiante en Master à l’IREST, Maurine fait partie du groupe d’étudiants qui développe le premier outil sélectionné. Maurine : « On se concentre sur l’aspect économique du tourisme durable en essayant d’identifier les fuites économiques à destination, ce qui permettra ensuite aux TO partenaires d’ATR de prendre conscience de leur impact économique dans les territoires concernés. » Nommé Touri Sieve, un jeu de mot entre « Tourisme » et « Sieve » (fuite en anglais) que l’on peut aussi lire « To Receive » (recevoir), le projet vise à mettre en valeur le territoire. Concrètement, l’outil se présentera sous la forme d’un questionnaire en ligne que l’association ATR pourra ensuite diffuser aux TO partenaires. Ces derniers, en fonction du score obtenu, pourront bénéficier de recommandations qui prendront pour base la chaîne de valeur du tourisme (transports, hébergements, restaurants, activités, autres). A chaque maillon de la chaîne, un score, que les T.O pourront aussi comparer entre eux. D’ores et déjà, Maurine et son groupe ont simplifié le questionnaire antérieur que leur avaient légué leurs camarades. « Le questionnaire était très complexe. On a choisi de le simplifier au maximum tout en gardant une cohérence afin de donner une idée globale aux TO de leur impact et de leur fuite. » Sur le front pédagogique, les étudiants sont invités à utiliser leurs cours pour mieux cadrer les projets, les affiner, comme le pourcentage attribué à chaque dépense, mais aussi à continuer leurs recherches bibliographiques. Frédéric Thomas : « Les étudiants ont aussi deux cours en M2 qui traitent de Tourisme et réduction de la pauvreté et de Tourisme inclusif ; où ils apprennent à réfléchir à ces impacts. »
→ Projet AVA
Eloïse fait partie du groupe d’étudiants qui a repris le projet AVA initié par ses camarades Adélaïde, Valentin et Abdelmajid (AVA). L’idée, analyser le ressenti des communautés locales quant au tourisme via un questionnaire en ligne. Eloïse : « Ce système est conçu pour être adaptable et applicable à toutes les destinations touristiques à travers le monde, dont bien sûr celles concernant les partenaires d’ATR. » Pour affiner le questionnaire, cinq thématiques issues des Objectifs du Développement Durable ont été déterminées : « Santé et bien-être ; Emploi et niveau de vie, Villes et communautés durables, etc. ». « On a essayé d’avoir les ODD les plus représentatifs pour les habitants, balayant la psychologie, la qualité de vie, les emplois ; etc. » Pour l’heure, le questionnaire initial a été simplifié, écourté, afin d’en faire un outil simple et ludique, qui encourage les participants à répondre. Sa méthodologie de diffusion est également en cours de réflexion.
→ Projet Sustain Monitor
C’est un indicateur de durabilité que nous présente Clémence qui a repris avec son groupe (5 autres étudiants) le projet Sustain Monitor. Clémence : « Notre objectif est de mesurer la durabilité des modèles économiques des partenaires d’ATR. » L’idée, une auto-évaluation des DMC (réceptifs) à destination via une barème de 1 à 10 permettant aux TO d’ATR de mesurer la durabilité de leur partenaire. Trois champs seront évalués : la dépendance du modèle financier, la durabilité économique du partenaire et son impact économique. Clémence : « Nos indicateurs de performance (KPI) s’intéresseront par exemple à l’impact du label ATR sur les modèles économiques des prestataires, mais aussi, à des points cruciaux de la durabilité économique comme le choix des fournisseurs, les pratiques de management et la production de service. » L’ensemble se présentera sur la forme d’un tableau de bord contenant un questionnaire dont les résultats pourront ensuite être traduits sous forme de graphiques en open source via Python DASH. Clémence : « La durabilité économique peut ainsi être vue sous le prisme de la dépendance, par exemple, comment les membres ATR facilitent l’indépendance économique de leur partenaire en ne demandant pas l’exclusivité. »
Une pédagogie active au cœur des problématiques de terrain
Il faut souligner le bien fondé de cette pédagogie active qui immerge les étudiants au cœur des problématiques de terrain et leur permet de se confronter directement à des professionnels, pour certains leurs futurs employeurs. Francesca Cominelli : « Nous sommes soutenus par l’Université Paris 1 Panthéon- Sorbonne via un fond dédié, ce qui nous permet d’organiser ces activités, de financer les voyages, et de cadrer l’ensemble du partenariat. » L’intérêt du projet est aussi qu’il reste avant tout piloté par les élèves. Les enseignants sont là pour border et soutenir mais ce sont les jeunes qui mettent en place les projets. Frédéric Thomas : « Notre rôle est de les laisser se questionner et d’initier une dynamique de réflexion collective comme c’est le cas autour des questionnaires qu’il a souvent fallu simplifier. » Et les étudiants se prennent au jeu, au point qu’un travail initié par une première génération repris ensuite par la suivante demande aussi un certain recul. Francesca « C’est un bon travail de réflexion sur l’entreprenariat, sur ce que cela implique comme investissement et renoncement. »
La prochaine étape sera la participation aux Universités du Tourisme Durable de Bordeaux (le 4 et 5 novembre prochain), puis la présentation en janvier des trois outils finalisés aux membres d’ATR. L’occasion de recueillir les premiers retours, et surtout, après une phase de mise en forme de l’outil, d’initier les premiers tests auprès des différents acteurs. Se pose également la question de la propriété intellectuelle de tels outils ? Seront-ils estampillés IREST, ATR, quid des étudiants ? Francesca : « Cela fait partie des sujets que l’on doit encore aborder avec ATR mais il s’agit avant tout d’un travail d’étudiants, qui portent le projet, et qui nous sollicitent s’ils ont besoin de nous. » Il sera donc très intéressant d’observer à l’avenir comment les membres d’ATR sauront s’approprier ces outils et si certains se voient intégrés dans leur stratégie mais d’ores et déjà, l’ensemble du projet aura permis à plusieurs générations d’étudiants de se confronter à un travail d’équipe passionnant mêlant terrain, recherche, innovation et durabilité. A suivre…
Par Geneviève Clastres
Auteur et journaliste indépendante spécialisée sur le tourisme durable et le monde chinois, Geneviève Clastres est également interprète et représentante de l'artiste chinois Li Kunwu. Collaborations régulières : Radio France, Voyageons-Autrement.com, Monde Diplomatique, Guide vert Michelin, TV5Monde, etc. Dernier ouvrage "Dix ans de tourisme durable". Conférences et cours réguliers sur le tourisme durable pour de nombreuses universités et écoles.
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