À Calvi, l’IA se met au service d’une chasse aux trésors corsée !

Il sera prochainement possible de découvrir Calvi et sa Citadelle en suivant un avatar de Christophe Colomb ! Présentée en avant-première lors du festival Green Orizonte de Calvi, cette chasse aux trésors créée par Romain Deceuninck démontre que l’IA peut aussi stimuler la créativité et proposer un accompagnement individualisé à chaque visiteur. Un projet qui en cache un autre, plus ambitieux encore, visant à utiliser l’IA pour valoriser les langues et cultures régionales avec le corse en ligne de mire.

Chasse au trésor dans la citadelle

« Pars à l’assaut de la Citadelle de Calvi en compagnie de Christophe Colomb et devient le héros d’une aventure interactive… Rejoins les 11 lieux de ta mission et retrouve le code à 4 chiffres caché quelque part dans la ville… Bonne chance ! » Tel est le message que vous pourrez trouver sur le site de l’Office de Tourisme Calvi-Balagne, commanditaire de cette chasse aux trésors futuriste où l’IA pourra aider petits et grands à découvrir autrement le territoire. Un pari relevé par Romain Deceuninck, artiste, réalisateur, qui, après une carrière dans la réalisation et un premier métier consistant à raconter des histoires, s’est totalement immergé dans l’IA et toutes ses possibilités. « Nous avons imaginé une première aventure, « Les remparts de la mémoire », mais l’idée est d’en créer d’autres, inspirées des précédentes, et ce, pour un cercle vertueux insulaire qui se tire vers le haut ». En cours de finalisation, le projet consiste en une chasse aux trésors en compagnie d’un avatar de Christophe Colomb dont les connaissances s’arrêtent au moment de sa mort. Les participants pourront dialoguer avec cet avatar, qui s’adaptera à l’âge et au niveau de chacun, comme si vous lui parliez à l’époque de son existence. L’aspect historique a donc été particulièrement soigné, avec la possibilité de demander au personnage de parler en vieux génois par exemple.

Prévue pour durer de 2 heures à toute une après-midi, cette première chasse aux trésors incite les visiteurs à déambuler dans Calvi et sa citadelle à la recherche d’indices. Ils peuvent la réaliser en continu ou s’arrêter, prendre un café, puis reprendre à leur rythme. L’idée est avant tout de vivre une aventure avec une bande son (un album entier !) pour accompagner l’ensemble. Romain Deceuninck : « Je ne souhaitais pas que les participants passent leur temps avec un téléphone à échanger avec une IA. L’idée est plutôt d’interagir. Pour cela, on a travaillé avec des décorateurs de cinéma. Des objets sont disséminés dans la citadelle. On échange uniquement à l’oral avec Christophe Colomb, ce qui permet de libérer les yeux pour plonger dans l’aventure. » Le pari est aussi d’amener un visiteur lambda à une connaissance historique plus fine, réanimer cette curiosité pour le passé en utilisant la capacité de l’IA à s’adapter à tous. Directrice de l’Office de tourisme Calvi-Balagne, Anne-Marie Piazzoli s’enthousiasme face au rendu de cette chasse aux trésors : « C’est très innovant, l’IA apporte beaucoup de créativité, or aujourd’hui, les voyageurs recherchent des expériences personnalisées qui les font vibrer et les aident à mieux connaître la destination. »

Valoriser la langue corse grâce à l’écosystème LIV

Au-delà de la chasse aux trésors réalisée pour l’Office de tourisme Calvi-Balagne, Romain Deceuninck multiplie les projets et les expérimentations avec l’IA. Il faut dire qu’il s’est littéralement plongé dans cette nouvelle technologie lorsqu’il a compris, en 2017, que l’IA allait reconfigurer tous les secteurs d’activité : « Je me suis dit, qu’est-ce que je fais, je m’y oppose ? Finalement, j’ai fait le contraire, j’ai voulu tout lire, tout comprendre, et voir comment en tirer parti. » Son credo : « Vous ne vous ferez pas voler votre travail par une IA, mais par quelqu’un qui maitrise les IA ! ». Conscient qu’une IA est avant tout un système complexe que seuls une poignée de chercheurs au monde comprennent finement, une matrice que seuls les humains font évoluer puisqu’elle récupère toutes les infos, il décide à son tour de « nourrir la bête » via un projet engagé. « L’IA, ce n’est pas de la magie, juste des maths et un data set. Son objectif, vous garder connecté le plus longtemps possible, ce qui va parfois l’amener à vous donner raison, même quand vous avez tort. » Son idée : avoir une IA ancrée en Corse et au service de la Corse via la création de l’écosystème LIV (Lingua Intelligente Virtuale), un modèle expert IA & communication engagé pour la valorisation des langues et cultures régionales.

Le point de départ de LIV consiste à entraîner un modèle d’IA spécialisée en langue corse en s’appuyant sur un laboratoire de recherche. « Tout ce qui concerne la langue corse, ses spécificités linguistiques, culturelles, doivent être protégés. Il est important d’en être souverain ». L’écosystème se décline donc en plusieurs serveurs, basés en Corse, qui permettent ensuite de créer leurs propres modèles et de répondre à des problématiques concernant l’éducation (LIVIA), la recherche universitaire insulaire (LIVCAMPUS), la gamification au service du tourisme (LIVQUEST), la culture et l’administration (LIVIU), etc. LIVIA pourra améliorer l’usage de la langue corse en se nourrissant par exemple dans les écoles des  connaissances linguistiques des enfants pour faire évoluer la pratique. LIVIU pourrait être un assistant culturel et administratif rassemblant toutes les spécificités culturelles et administratives de l’île (Qui contacter pour telle ou telle demande ?…). Enfin, LIVQUEST vise à développer la « gamification » via des aventures immersives à l’image de la chasse aux trésors réalisée à Calvi. En perpétuelle évolution, le projet LIV est aussi un acte engagé pour un data set souverain sur l’île avec un comité d’experts choisi par la Collectivité. Un projet qui pourrait aussi permettre à l’IA de protéger les identités et les différences là où l’on peut parfois craindre que tout ne s’uniformise à force de technologies mondialisées.