Pandémie et tourisme : la crise vue par les agences de voyage locales
Comment les agences de voyage locales survivent-elles et gèrent-elles la crise du coronavirus et ses conséquences? Rencontre avec Sylvain Recouras, fondateur et directeur du collectif d’agences de voyage locales, Nomadays.

Flash back sur 2020
« 50% de notre activité était lié à l’organisation de voyages en Mongolie, et plus de 80% de l’ensemble de notre activité était concentré sur l’Asie. Or la Mongolie a été le premier pays à fermer ses frontières dès le mois de Janvier 2020« , commence Sylvain Recouras, fondateur et directeur de Nomadays, en plantant le décor. Grâce à sa plateforme, Nomadays – un collectif indépendant d’agences de voyage locales et francophones présent dans le monde entier – permet aux voyageurs de rentrer directement en contact avec des agences locales d’organiser avec elles leur voyage sur mesure dans le pays de leur choix. Mais depuis un an, crise oblige, la plateforme tourne plus qu’au ralenti, en tout cas, en ce qui concerne la réservation de voyages…

La volonté de continuer à tout prix !
« En 2020, nous avons perdu 98% de notre chiffre d’affaires, et malheureusement notre installation en France étant trop récente – nous avons obtenu notre licence Atout France en Août 2019 -, nous n’avons pas pu recevoir d’aides de l’état », déplore Sylvain avant d’ajouter que les employés de Nomadays n’ont pas bénéficié non plus des mesures du chômage partiel, étant exclusivement basés à l’étranger. La chute drastique de CA du collectif et l’absence d’aides gouvernementales n’ont pas découragé l’équipe pour autant. « Nous sommes dans une phase de production et de préparation, et notre volonté a été de continuer à compléter notre offre« , poursuit Sylvain. Pour pouvoir garder cette politique d’avancer, il a dû prendre sur ses deniers personnels : « Nous avons vendu des bien et vidé nos épargnes. Cela aurait pu être plus facile si nous avions eu accès à de la dette, mais malheureusement la société était installée jusqu’à fin 2019 en Mongolie où les banques n’ont pas pu nous suivre, et en France nous n’avions pas l’historique suffisant pour pouvoir obtenir une aide ». Malgré cela, Nomadays est passée pendant la période de la Covid de 35 agences partenaires à plus de 60 aujourd’hui.

Une grande cagnotte solidaire
« Depuis un an, nous avons décidé de mettre à l’arrêt tout notre outil commercial, mais nous avons conservé nos équipes en productions – rédaction pour les sites, développement web, suivi et formation des agences partenaires -« , enchaîne Sylvain. Même si tout cela se réalise au prix de grands sacrifices personnels, il mentionne également la création en novembre 2020 d’une grande cagnotte solidaire auprès des anciens clients de Nomadays pour permettre de continuer à verser une rémunération aux équipes locales en Mongolie. « Notre cagnotte est aujourd’hui fermée et nous avons pu récolter 33 000 €. Cette somme nous permet d’assurer les salaires de notre équipe mongole de 13 personnes pendant encore quelques mois », explique-t-il.

L’aide en France, une chance par rapport à d’autres pays
De Mongolie, Sylvain revient à la gestion de la crise en France : « Même si nous n’avons pas pu personnellement recevoir d’aides de l’État français – notre situation ne pouvait pas être pire avec un lancement à quelques mois de la Covid – , je pense que le gouvernement a globalement très bien aidé les entreprises françaises, et notamment celles évoluant dans le secteur du tourisme« . Il admet ensuite avoir la “chance” de pouvoir comparer avec ce qui se fait à l’étranger ou plutôt avec ce qui ne se fait pas, « car il ne se passe souvent rien en matière d’aides dans beaucoup de pays ». Pour lui, même si on peut ne pas être d’accord sur tous les volets de gestion de la crise en France, on ne peut nier l’impact fort de l’état pour préserver le secteur et l’économie française.

Le tourisme de demain : une vision très franco-française
Des aides gouvernementales, Sylvain passe à la notion de tourisme de demain qu’il qualifie de franco-française ou au mieux d’occidentale : « Aujourd’hui, ce sont les voyageurs asiatiques qui forment le gros du contingent des touristes internationaux, et j’ai bien peur que le tourisme de masse pour eux soit encore la norme pour leur voyage de demain. À nous de nous démarquer pour offrir à nos clients de réelles expériences de voyage loin des foules. C’est ce que nous faisions avant, et que nous continuerons à faire du mieux de nos compétences », précise-t-il, rassurant.

Le bout du tunnel
Quant à la reprise des activités touristiques, Sylvain commence à voir le bout du tunnel : « Nous sommes confiants que la reprise interviendra, de manière progressive à partir du 2ème semestre 2021. Nous attendons quand même avec impatience l’été pour savoir quel sera l’effet combiné de la campagne de vaccination, et l’arrivée des beaux jours ». En ce qui concerne le concept et les produits proposés par Nomadays, Sylvain estime qu’ils cochent toutes les cases du tourisme de demain, à savoir des produits spécialisés, de l’expérience, une organisation en direct avec des agences locales investies réellement dans l’économie locale des pays visités, et participant au développement d’un tourisme éco-responsable. Il mentionne également la protection légale offerte par le collectif Nomadays qui permet à tous les acteurs locaux d’être mis en lumière et de professionnaliser leur relation clients. Reste donc à attendre ces fameux beaux jours et surtout des jours meilleurs, pour passer du temps en ligne sur le site de Nomadays afin de concocter son premier petit voyage de l’après…
Par Elisabeth Blanchet
Ancienne prof de maths, je me suis reconvertie dans le photo journalisme en 2003 à Londres où je vivais. J’ai travaillé pour différents magazines dont Time Out London et j’ai développé des projets à longs termes dont un sujet les préfabriqués d’après-guerre, une véritable obsession qui perdure, les Irish Travellers -nomades Irlandais- dans le monde, les orphelins de Ceausescu - je suis des jeunes qui ont grandi dans les orphelinats du dictateur depuis 25 ans -. Je voyage beaucoup et j’adore raconter des histoires en photo, avec des mots, en filmant, en enregistrant… Des histoires de lieux, de découvertes mais surtout de gens. Destinations de cœur : Royaume-Uni, Irlande, Laponie, Russie, Etats-Unis, Balkans, Irlande, Lewis & Harris Coup de cœur tourisme responsable : Caravan, le Tiny House Hotel de Portland, Oregon – Mon livre de voyage : L’Usage du Monde de Nicolas Bouvier – Le livre que je ne prends jamais en voyage : L’oeuvre complète de Proust à cause du poids – Une petite phrase qui parle à mon cœur de voyageur : « Home is where you park it »
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