A la rencontre des peuples du monde
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Découvrir à pied d’autres paysages, d’autres peuples et d’autres cultures, depuis sa création il y a 40 ans, Allibert Trekking parcourt le monde dans le respect des populations et de l’environnement.
A l’heure où plusieurs T.O. ont fait de « la rencontre » une thématique phare de leurs propositions de voyages, Voyageons Autrement a rencontré Simone Allibert, pour qui cette « dimension » du voyage coule de source…
Voyageons Autrement : Quelle dimension la rencontre avec les autres peuples occupe-t-elle dans vos voyages ?
Simone Allibert : Je ne saurais pas définir la dimension occupée par les rencontres dans nos voyages car celles-ci s’y inscrivent de manière naturelle et spontanée depuis le tout début. Gardiens de refuge dans les premières sorties en montagne, bergers et muletiers croisés, cuisiniers du campement puis, partout ailleurs, ces guides qui vous font faire halte dans leur famille pour vous faire goûter huile d’olive et cerneaux de noix dans l’Atlas marocain ou chez un agriculteur ami dans les Hautes Terres de Madagascar parce que un voyageur s’intéresse à tel type de culture… Et puis tous ces habitants chez qui l’on passe la nuit !
En Birmanie, récemment, dormant dans un monastère, nous nous sommes retrouvés à partager la vie des moines durant plusieurs heures, certains participants connaissant alors des moments d’échange vraiment privilégiés. C’est quelque chose d’omniprésent, depuis toujours, contenu dans notre ADN et que l’on ne calcule pas, n’organise pas, parce que cela découle tout naturellement de notre manière d’envisager le monde.
VA : Quelles destinations se prêtent particulièrement à ces rencontres. Pouvez-vous donner un ou deux exemples ?
SA : J’allais dire : peut-être moins en Europe… mais là encore, en montagne, on l’a vu, les rencontres sont rares mais de qualité. Mais c’est surtout l’identité même de certaines régions : géographie, infrastructures, culture, qui fait qu’un voyage est davantage orienté vers la rencontre ou, en tout cas, plus riche en rencontres. En Afrique, au Maroc, par exemple, en Asie, surtout centrale, dès lors que vous cheminez à pied, vous allez être systématiquement invité par les gens que vous croisez à boire un verre de thé, du lait fermenté…
En Ouzbékistan, où l’on dort chez des familles, arrivant en fin d’après-midi, on partage le thé de bienvenue, puis les femmes accompagnent souvent leurs hôtes en cuisine ; ensuite, il y a le repas, la veillée. Dans le nord du Vietnam, même chose avec la traversée de ces petits villages jusqu’à celui où l’on dormira ; les fins de journée, à l’étape, se montrant souvent propices aux échanges…
Sans oublier cette multitude de rencontres et d’invitations « de hasard » qui, comme nous l’avons évoqué, se proposent toujours en chemin : fête religieuse locale, mariage, simple invitation à boire un verre d’eau… Invitations qui se multiplient parfois à tel point qu’il faut en refuser. Je pense que plus de la moitié de nos destinations se montrent extrêmement riches de ce côté.
VA : La dimension « humaine » des voyages proposés par Allibert a donc toujours été présente et privilégiée ; a-t-elle néanmoins évolué avec le temps ?
SA : Même si le but initial de nos voyages est centré sur la découverte d’un pays et non à proprement parler de ses habitants, la rencontre avec ceux qui y vivent occupe une place essentielle dans notre philosophie du voyage. Comment traverser certaines contrées reculées sans avoir envie de rencontrer les personnes qui y vivent, elles qui sont bien souvent aussi curieuses de nous que nous le sommes d’elles ? Comment, après des heures de marche dans la nature et le silence, arrivant dans un petit village et croisant – enfin ! – des humains, ne pas avoir envie d’échanger un peu avec ces personnes vivant dans des endroits pour nous si exotiques. Autant chez Allibert on aime les grands espaces, autant on apprécie davantage encore (et c’est logique) cet autre aspect, complémentaire, de la rencontre humaine.
VA : Comment parvenez-vous à en préserver le caractère « authentique » des rencontres, leur spontanéité ? Est-ce seulement possible ?
SA : L’authenticité, le meilleur moyen de la préserver est de continuer à ne rien programmer : pas de village pour touristes, pas de femmes girafes qui disparaissent aussitôt la photo faite et la main tendue. Nous nous « contentons » des rencontres qui se présentent… naturellement. Et cela existe encore, partout, des habitants curieux des voyageurs de passage, sans idée préconçue de profit, souhaitant simplement, comme nous, échanger.
VA : Allibert s’est engagé de bonne heure dans une démarche responsable. Pouvez-vous nous rappelez les grandes étapes de cet engagement ? …
SA : Là encore, nous nous sommes « contentés » d’être nous-mêmes. L’aventure Allibert est partie de balades en montagne, ces endroits préservés par excellence que l’on ne souhaite traverser et quitter que d’une seule manière : sans y avoir laissé la moindre trace, sans avoir entaché en rien leur magie. Puis ce furent les premiers voyages dans le désert, autre espace préservé majeur, au Maroc et en Algérie. Nous y avons été si bien accueillis ; comment aurait-on pu vouloir autre chose que préserver ces trésors naturels et humains ? Alors on l’a fait. On a fait du tourisme durable et responsable avant même que ces mots n’existent. Du tourisme solidaire, également, car comment ne pas s’attacher ou vouloir aider ces personnes avec qui l’on travaille sur place et qui nous ont si bien accueillis, si bien ouvert leur pays, leurs connaissances et leur cœur ? Qu’il s’agisse de formation, d’aide technique ou de projets, nous essayons donc d’être actifs auprès des populations avec lesquelles nous travaillons. Avec le temps, naturellement, les choses se sont un peu structurées, via notre association Globetrekkeurs entre autres ; les voyageurs Allibert ayant par exemple formidablement répondu à notre appel aux dons après le séisme survenu au Népal l’an passé.
VA : En dépit de la grande beauté des paysages traversés, nombre de personnes interrogées citent « les rencontres » comme étant leur « meilleur souvenir du voyage ». Comment expliquer cela ? Qu’est-ce qui fait que la rencontre, même fugace, avec un paysan, un montagnard, une famille dans son quotidien, nous marque souvent davantage que la splendeur des paysages ?
SA : Le simple fait d’être, tous, des humains. On peut tomber en extase devant la beauté d’un paysage qui vous en met plein les yeux ; on est alors touché par cette beauté, par LA beauté, mais ce début de fraternisation avec des inconnus, ces autres « humains » croisés, nous émeut plus encore, surtout nous, Occidentaux, qui courrons dans tous les sens et avons si peu de temps pour l’autre. Le voyage s’inscrit alors comme une parenthèse merveilleuse dans nos vies, où l’on prend de nouveau le temps d’aller vers l’autre, de s’y intéresser. Et ces moments rares, sincères et gratuits, de simple échange nous comblent, car ils nous rappellent combien ces échanges entre êtres humains sont essentiels.
VA : La première rencontre effectuée par un voyageur est bien souvent… son guide. On sait combien un bon guide est un élément ca-pi-tal de la réussite d’un voyage. Comment choisissez-vous les vôtres ? Qui sont-ils et qu’ont-ils en commun ?
SA : Un élément capital, oui, car le guide est le lien, le pont entre la culture du voyageur et celle qu’il souhaite découvrir. Aussi est-il essentiel que le guide soit une personne qui possède les clés et ouvre les portes de notre compréhension, pour nous donner accès à ce monde nouveau, le rendre intelligible. Nous choisissons nos guides d’abord sur leurs compétences techniques s’il s’agit de montagne ou sur leur connaissance du pays ailleurs mais, surtout, nous les choisissons pour leur ouverture d’esprit et leurs qualités humaines, leur désir de faire partager leur amour d’un territoire et de ses habitants et leur capacité à transmettre cela, à tisser ce lien constant avec la réalité locale. S’ils ont ce talent, peu importe qui ils sont : hommes, femmes, jeunes, vieux…
VA : Qu’est-ce qu’on n’a pas dit ?
SA : Le plus évident peut-être, parce que cela semble un lieu commun. Mais cela n’en est pas moins juste pour autant : en voyage, les rencontres sont ce qui fait la différence. Elles ajoutent cette chaleur humaine indispensable, cette sincérité, ce sentiment surtout d’être accepté et bienvenu sur un territoire qui nous est, au départ, étranger.
Par Jerome Bourgine
Ecrire et voyager. Voyager et écrire... Depuis 50 ans.
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