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Le Vélo dans le monde, maillon fort d’une chaîne sociale pour un développement durable !

| Publié le 29 juin 2015
Thèmatique :  Acteur privé   Vélotourisme 
             

Le vendredi 5 juin, à l’occasion de Velo-City, une table ronde passionnante s’est tenue à la cité internationale des congrès de Nantes. Elle a confirmé l’importance de l’usage du vélo au nord comme au sud, mettant en lumière combien la bicyclette, au-delà d’être un enjeu de développement durable, est également un atout d’égalité sociale et de désenclavement sociétale pour nombre de pays aujourd’hui pris dans une course au développement, une course certes effrénée, mais malheureusement trop peu analysée et remise en cause.

Vélo à l'honneur

Parade à vélo dans les rues de Nantes pour Vélo City@GClastres

Parce qu’il faut que les roues tournent !

Il y a encore 20 ans, les villes de Chine étaient envahies par des centaines de bicyclettes filant le long des artères. Vingt ans plus tard. Les voitures ont envahi le monde urbain. La pollution aussi. Les klaxons ont remplacé les sonnettes. La rue qui était alors un espace accueillant et ouvert s’est refermée sur le flot des voitures. A chaque siècle son encre. Et ce besoin de reproduire et de passer par les mêmes modèles qui ont pourtant montré leur limite. Irréversible ? Sûrement pas. Les choses bougent et les Chinois sont bien conscients qu’il est urgent de revenir à des modèles plus durables. Cyclicité des cycles. En Afrique, les choses aussi ont besoin de bouger et de changer d’angles. Urbaniste et enseignante à l’Université de Makerere, Kampala (Ouganda),  Amanda Ngabirano regrette qu’aujourd’hui, le vélo ne soit pas plus reconnu en Afrique. « La plupart des leaders africains ne comprendraient pas pourquoi nous sommes là à discuter de vélo. La différence entre les pays du nord et les pays du sud, c’est qu’au sud, les vélos sont invisibles ». Dans le mouvement d’urbanisation qui touche l’Afrique, la mobilité est un point critique, la priorité est donnée à la voiture. Les vélos ne sont pas reconnus. Les cyclistes sont surtout des pauvres et aucune infrastructure n’est prévue pour leur donner un peu d’espace, un peu d’air. Les conséquences sont bien sûr dramatiques. Beaucoup de cyclistes meurent dans l’indifférence la plus totale. Et on sait combien un actif de moins peut être un drame dans une famille pauvre, au-delà du traumatisme…

Les dangers du vélo

Vélo parade à Nantes@GClastres

Ces villes mutantes qui pédalent de l’avant

A Istambul aussi, on aimerait bien donner un coup de pédale de plus pour le vélo. Directrice exécutive Embarq Türkiye, Arzu Tekir s’interroge sur comment intéresser et motiver plus de personnes sur les avantages du vélo, afin de créer un environnement durable pour les habitants. « A Istambul, il n’existe pas d’infrastructures pratiques. Et pourtant, grâce au vélo, les gens deviennent égaux, s’approprient équitablement la cité. » Dans le monde entier, villes et décideurs s’interrogent. Chacun à son niveau. Chacun à son stade de réflexion et de développement. Certes, les villes du nord sont en avance mais là aussi, le vélo a du s’imposer. Vice-présidente de la Communauté urbaine de Bordeaux et maire de Bruges(France), Brigitte Terraza explique comment sa ville s’est peu à peu engagée pour la petite reine : « Il y a quinze ans, Bordeaux s’est engagé dans un vaste programme de développement du tramway et des pistes cyclables. Il s’est accompagné d’une campagne pour inciter les habitants à reprendre leur vélo. On a joué sur l’image du vélo mais aussi, on a mis en place une politique de tarification encourageante (pour 1 € de plus, accès au vélo en libre service). Cela a boosté l’image du vélo dans la métropole. » Bordeaux a également fait sortir de terre de grands parkings de proximité à la sortie des rocades, ce qui a permis de faire le relais avec le Vélo Service.

Ville mutante

Parade à vélo à Nantes@GClastres

Tirer les sonnettes d’alarme

Amanda Ngabirano en est convaincu. En Afrique aussi, pris sérieusement, le vélo pourrait être un allié pour aider les enfants à aller à l’école, favorisant ainsi l’accès à l’éducation. Il a un grand rôle à jouer. Economique, sain, facile, il pourrait aussi permettre aux femmes qui n’ont pas toujours le droit de conduire de retrouver du travail. Au-delà du simple mode de transport, il représente un véritable enjeu social et d’égalité des sexes. Mais, pour cela, il y a beaucoup de travail à faire, de combats à mener, et Amanda se sent bien seule, elle qui arpente les salons, les conférences, en appelle à l’aide des organisations locales, nationales, à la communauté mondiale du vélo. « Dans la plupart des pays d’Afrique, il y a beaucoup à faire. Mais il faut nous aider à faire prendre conscience aux décideurs africains que le vélo doit être pris au sérieux. La classe moyenne n’en a même pas idée. Chez nous, si un cadre supérieur arrive au bureau à vélo, il sera considéré comme un original. Mais tu es fou, mais qu’est ce que tu fais avec ton vélo ? … » Malheureusement, pour l’heure, le budget transport de pays africains comme l’Ouganda ou le Kenya est à 100% consacré à la voiture. Et dans le monde, nombreux sont les pays à se heurter à des résistances en tout genre. Depuis la salle du congrès, Raoul (Vénézuela), explique que pour lui, le vélo est un espoir, mais que le gouvernement n’est pas très aidant lui qui va jusqu’à payer l’essence pour les voitures. Jacky (Melbourne) se plaint quant à elle des nombreuses frilosités du monde politique australien.

Tous en selle !

Tirer les sonnettes

Parade à vélo à nantes@GClastres

Petit à petit, envers et contre tout, les choses changent. A Istambul, le ministère a lancé un plan stratégique de développement sur dix ans. En outre, le département de la santé a décidé de donner un million de vélos aux villes qui développeront les infrastructures adéquates. Arzu Tekir : « Nous avons aussi un système de partage des vélos que les gens adorent, le « Bike sharing system ». Tous les dimanche, de grandes artères sont fermées à la circulation et les gens peuvent faire du vélo. C’est un vrai succès. » Dans la salle, une représentante de Singapour témoigne également de l’implication de son gouvernement pour le vélo : « On est petit, mais le gouvernement fait beaucoup pour le vélo. Pour 2020, notre challenge est de faire de Singapour une « cycling nation ». Un autre témoignage enchaine sur les initiatives prises au Brésil, où là aussi un programme spécifique pour le vélo est en train d’être mis en place.

Parce qu’il y a aussi des freins…

Chacun se bat donc avec ses armes mais le degré de maturité « vélo » d’un pays à l’autre reste très variable. Amanda Ngabirano : « Chez nous, l’addiction aux voitures est trop forte, les gens veulent posséder leur véhicule. Malheureusement, pour les plus pauvres, 50 % des revenus passe dans les transports. » Socialement, le vélo pourrait être un moyen de casser le fossé entre les riches et les pauvres mais les programmes peinent à démarrer. Amanda : « En Ouganda, la population est très jeune. A petite échelle, le bicycle sharing commence, surtout pour les étudiants. Au Kenya au contraire, c’est très frileux. A Nairobi, les rues sont pleines d’inhospitalité, elles ne sont pas faites pour les humains. » Même dans des villes comme Bordeaux, plus sensible à ces problématiques, les choses ne sont pas toujours gagnées. Brigitte Terraza : « Malgré les investissements, beaucoup d’habitants continuent à utiliser leur voiture. Près de 70 à 75% des transports se font toujours en voiture. Nous menons une réflexion sur comment inciter toujours plus les locaux à utiliser le vélo. C’est un changement de vie qui est en jeu. » Pour cela, la municipalité ne lésine pas. A Bordeaux, quand un nouveau citoyen arrive, un conseiller en mobilité de la ville prend de suite contact avec lui et l’encourage à utiliser le vélo. En outre, la ville compte également sur le tourisme et le développement de grands circuits de randonnées à vélo dans la région pour que le vélo loisir devienne peu à peu un élément du quotidien. La Vélodyssée traverse ainsi les Landes et la Gironde.

L'avenir

L’avenir est devant nous !@GClastres

Sortir la tête du guidon…

Et si on levait enfin la tête. Tout près de chez nous, les choses changent aussi… les Départements et Territoires Cyclables de France font un gros travail de lobbying pour faire voter des textes qui favorisent les deux roues. Ainsi, début juin, une loi a été votée pour que les entreprises donnent une prime aux salariés qui viennent au travail en vélo. Certes, il y a cinquante ans, le patron arrivait en voiture et les ouvriers à vélo. C’est aujourd’hui presque l’inverse. Mais gageons que la loi aidera à retourner la situation. De même France Vélo Tourisme aide à la mise en place de véloroutes et voies vertes. Là aussi les choses progressent. Il n’est jusqu’aux voyagistes pour proposer à présent des catalogues entièrement centrés sur le vélo, à l’image de Terdav.  Alors, certes, on voit encore trop de publicité pour les voitures quand les encarts consacrés au vélo restent rares. Mais tout le monde sait aussi que le vélo est un succès pour l’économie (4 milliards d’euros pour le PIB Grande-Bretagne !), qu’il fournit des emplois (35 000 en France !), qu’il implique des investissements. D’après le magazine TerraEco, si la France pédalait autant que les Allemands, on ferait 15 milliards d’euros d’économie de santé et on augmenterait de 27% le chiffre d’affaire du tourisme lié au vélo. Finalement, pédaler c’est résister !

Pédaler c'est...

La fleur au canon@GClastres

 


Le Vélo dans le monde, maillon fort d’une chaîne sociale pour un développement durable ! | ©VOYAGEONS AUTREMENT
Par Geneviève Clastres
Auteur et journaliste indépendante spécialisée sur le tourisme durable et le monde chinois, Geneviève Clastres est également interprète et représentante de l'artiste chinois Li Kunwu. Collaborations régulières : Voyageons-Autrement.com, Monde Diplomatique, Guide vert Michelin, TV5Monde, etc. Dernier ouvrage "Dix ans de tourisme durable". Conférences et cours réguliers sur le tourisme durable pour de nombreuses universités et écoles.
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