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Rencontre avec Muriel Faure, directrice générale de la Grande Traversée des Alpes

| Publié le 4 mars 2015
Thèmatique :  Institutionnel   Territoire 
             

Fer de lance de la Grande Traversée des Alpes dont elle est directrice, Muriel Faure vient de remporter une belle victoire pour le massif alpin, qui s’est matérialisée le 16 décembre dernier par la signature d’un contrat de destination au Ministère des affaires étrangères. Objectif affiché : mettre en lumière la montagne en été afin de faire de ce massif une destination d’excellence capable d’attirer toujours plus la clientèle internationale. Sous la bannière « Voyage dans les Alpes», la montagne estivale est donc à présent reconnue comme un enjeu pour le rayonnement de la France à l’étranger.

De GàD : Carole Delga, Sécrétaire d'Etat, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et d e l'économie sociale et solidaire; Matthias Fekl, Secrétaire d'État chargé du Commerce extérieur, de la Promotion du tourisme et des Français de l'étranger; Madame Claude Comet, Conseillère régionale Rhône-Alpes, déléguée à la Montagne et au Tourisme; Jean-Yves Roux, Vice-Président du Conseil général des Alpes de Haute Provence, Sénateur; Muriel Faure, Directrice générale de la Grande Traversée des Alpes

Signature du Contrat de Destination au MAE avec Muriel Faure (droite)@DR

VA / Quel est la valeur ajoutée d’un contrat de destination puisqu’il existe déjà un Comité de massif des Alpes chargé de fédérer des politiques communes ?

Effectivement, depuis la loi montagne de 1985, une « politique de massifs » a été instituée avec 6 massifs reconnus en Métropole (Vosges, Jura, Alpes, Pyrénées, Massif Central et Corse). Cette reconnaissance du rôle du massif est symbolisée par le Comité de massif. Il en existe un par massif. Instance consultative, il réunit des représentants des collectivités territoriales, du monde associatif et des socioprofessionnels et joue un rôle de veille permanente pour assurer la prise en compte des spécificités de la montagne dans les politiques publiques. Aujourd’hui, 69 organisations et personnalités sont membres du Comité de Massif des Alpes, débattent, échangent et travaillent à la mise en œuvre des priorités du « Schéma interrégional du massif des Alpes » dans les domaines des transports, de l’énergie, du tourisme, de l’agriculture, etc.

Par son histoire, par sa vocation interrégionale affirmée dès l’origine, et par ses métiers d’opérateur touristique et d’expert – consultant, la GTA est au cœur des politiques de développement touristique du massif. Et c’est assez logiquement que le comité de massif des Alpes a confié à la GTA l’élaboration de la candidature alpine, et aujourd’hui la coordination de la mise en œuvre du contrat. Le Contrat de destination vise à accroître les retombées économiques du tourisme dans les Alpes par la promotion à l’international des grandes itinérances et des pépites naturelles et culturelles du massif. Le plus du contrat, c’est qu’il va permettre de mettre un focus sur la montagne en été où, jusqu’à présent, il n’y avait pas de stratégie commune à l’échelle des Alpes. L’offre touristique est éclatée, diffuse, peu lisible pour les clientèles. Le contrat nous offre un cadre de travail partagé où nous devrons faire la preuve de notre capacité à collaborer, à faire avancer tout le monde ensemble.

La carte IGN

Randonnée dans les Alpes@GTA

Les Alpes se caractérisent par une économie saisonnière, avec un poids majeur des sports d’hiver. L’été est souvent perçu comme un complément, voire comme la saison des travaux pour préparer l’hiver suivant. On ne peut plus se satisfaire de cette vision partielle du système économique alpin. Face à l’effritement de la fréquentation de la montagne, aux premiers effets du changement climatique, au vieillissement des clientèles touristiques, aux mouvements de métropolisation et à l’urbanisation des modes de vie, nous avons une responsabilité collective à faire évoluer les modèles de développement touristique. Le contrat vise à promouvoir une montagne estivale attractive, tendance et moderne. Enfin, il offre une bannière commune – « Voyage dans les Alpes – avec des produits « têtes de gondole », qui permettra ensuite de valoriser les offres ayant moins de notoriété.

VA / Vous avez fait le choix de valoriser plus spécifiquement la montagne en été. Quels en sont les raisons ?

Tout est parti d’un constat : depuis dix ans, la montagne l’été a connu une baisse de fréquentation de 10% en moyenne. Certaines régions s’en tirent mieux que d’autres mais dans l’ensemble, la baisse est là. Les raisons en sont multiples, la concurrence des autres destinations (les Alpes européennes et les autres massifs français, la campagne, la mer…), la concurrence des villes et du tourisme urbain qui s’est beaucoup structuré mais aussi l’intensification des nouveaux loisirs récréatifs (jeux vidéos, smartphone, mur d’escalade en ville, VTT urbain) et nombre d’activités de montagne amenées à la ville. Toutes ces offres éclatées concurrencent la montagne l’été, qui est également soumises aux aléas météo. Il était donc nécessaire de mettre en place une stratégie dédiée à la montagne l’été.

VA / Comment cela va-t-il s’organiser sur le terrain ?

Quatre volets techniques ont été définis : Ingénierie, Formation, Promotion-Communication, Veille et Evaluation. Ils seront pris en charge par des animateurs réunis par un comité de pilotage chargé de mettre en route l’ensemble. Atout France, les collectivités territoriales et leurs organisations touristiques, les Chambres de Commerce et d’Industrie, etc., sont partie prenante. Le massif alpin bénéficie d’une grande richesse patrimoniale et touristique et la marque « Voyage dans les Alpes » nous permettra de mettre en avant des produits phare, attractifs, séduisants pour les clientèles européennes. Mais la clé de succès du contrat, c’est l’implication des acteurs privés, professionnels de la montagne, hébergeurs, agences réceptives, équipementiers, dans l’ensemble de de la démarche. Les acteurs économiques sont un pilier du contrat de destination.

L'été sur les alpages

Les Alpes à vélo@GTA

VA / Comment l’ensemble est-il financé ?

Pour les trois années que dure le Contrat de Destination, un financement de 75 000 € a été prévu par l’Etat mais nous pouvons aussi compter sur d’autres ressources. Le massif des Alpes bénéficie de financements dédiés à son développement, en particulier au travers de la convention interrégionale du massif des Alpes et du programme opérationnel européen.  Nous travaillons actuellement à la définition précise et très opérationnelle des actions à mener, avec en face les financements disponibles.

VA/ Avez-vous d’ores et déjà quelques projets en tête ?

Les idées ne manquent pas : promouvoir les produits cyclo-sportifs avec les plus beaux cols du monde, valoriser les randonnées pédestres, traversée des Alpes ou grands tours de massif, offrir ce territoire extraordinaire à tous grâce au développement du vélo électrique… Et en parallèle, accompagner les acteurs du territoire pour améliorer l’accueil des clientèles touristiques, en particulier européennes, travailler à un référentiel vélo Unique à l’échelle des Alpes qui pour l’heure comptent 14 référentiels Accueil Vélo différents, créer de la fluidité entre hébergeurs, loueurs, sites, créer également un référentiel commun pour valoriser tout ce qui se fait déjà quant au tourisme responsable (portail d’écotourisme en PACA, hébergeurs labélisés, parc régionaux ou naturels, espaces protégés, etc.).

VA/ En ce qui concerne le tourisme responsable justement, comment faire en sorte d’accélérer toujours plus les bonnes pratiques ?

Les Alpes sont perçues comme un territoire très aménagé, moins « sauvage » que le massif des Pyrénées par exemple. C’est vrai en partie, et grâce à ces équipements, aux aménagements, cela en fait une destination à la fois sécurisante, très accessible et riche en offres d’activités. Mais les Alpes, c’est aussi 3 parcs nationaux, 8 parcs naturels régionaux (et d’autres en projet), des zones Natura 2000, une agriculture de qualité avec des pratiques de pastoralisme et de production respectueuses de l’environnement, des associations militantes qui mobilisent les professionnels et les habitants dans des démarches plus éco-responsables, des entreprises également… Les Alpes sont un incroyable espace de nature et de culture pour celles et ceux qui veulent vivre une expérience unique, se ressourcer, partager, faire la fête, se dépasser… Et dans le cadre de ce contrat de destination, nous voulons développer et promouvoir des pratiques de mobilités douces, à pied, à vélo, à VAE, en kayak, etc. Les Alpes sont une terre d’itinérances douces et durables ! Le slow tourisme c’est prendre le temps, un luxe extraordinaire dans le monde d’aujourd’hui.

VA/ Une dernière chose que vous souhaiteriez ajouter ?

C’est ensemble, acteurs publics et privés, habitants mais aussi avec les clientèles touristiques, que nous ferons naître une véritable intelligence collective pour une économie alpine durable.

—————- ALLER PLUS LOIN ——————-

http://www.grande-traversee-alpes.com/

 


Rencontre avec Muriel Faure, directrice générale de la Grande Traversée des Alpes | ©VOYAGEONS AUTREMENT
Par Geneviève Clastres
Auteur et journaliste indépendante spécialisée sur le tourisme durable et le monde chinois, Geneviève Clastres est également interprète et représentante de l'artiste chinois Li Kunwu. Collaborations régulières : Radio France, Voyageons-Autrement.com, Monde Diplomatique, Guide vert Michelin, TV5Monde, etc. Dernier ouvrage "Dix ans de tourisme durable". Conférences et cours réguliers sur le tourisme durable pour de nombreuses universités et écoles.
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