Voyage « En Immersion » dans les territoires incarnés d’Occitanie et au-delà
Se plonger dans le secret de la fabrication de l’Armagnac, vivre dans une manade en Camargue, observer les vautours sur les causses du Larzac, suivre les traces de l’ours des Pyrénées, s’initier à la pêche à la mouche dans la Béarn ou apprendre à fabriquer l’Ossau-Iraty dans la montagne Basque…. Tel un hommage au voyageur éclairé qui abrite au fond de lui l’âme d’un découvreur brûlant d’aller au-delà de la carte postale et de pouvoir s’immerger dans un lieu, sociologue de l’instant tentant de saisir une parenthèse de la vie d’un autre, Loïc Sanchez a créé En Immersion, un blog devenu agence de voyage d’un genre nouveau. Il propose d’ores et déjà près de 50 micro-immersions centrées sur les régions oubliées d’Occitanie et au-delà, autant de possibilités de s’imprégner de la réalité d’un terroir sous le patronage bienveillant d’un habitant qui accepte de partager un temps donné de son quotidien.

Une idée dans l’air du temps
Comme nombre de milléniaux, Loïc Sanchez a eu une « vie d’avant », ces années où il filait dès que possible aux confins de la France ou à l’autre bout de la planète pour s’immerger au cœur de nouvelles cultures. Puis, un jour, juste avant qu’un micro-virus paralyse l’ensemble du globe, comme s’il avait senti le vent tourner, il décide de s’inventer une autre vie, un chemin qui lui ressemble plus, un biais pour découvrir d’autres cultures sans aller systématiquement à l’autre bout du monde, empreinte carbone en bandoulière…. L’idée, renouer avec les terres oubliées de nos territoires en prenant les habitants et les particularités du terroir comme fil conducteur. En janvier 2020, alors que la crise sanitaire se profile, il esquisse un projet qui profite du premier confinement pour s’affiner par une étude sur les comportements des voyageurs. « Je voulais savoir si ma soif de découverte culturelle en France était partagée par d’autres voyageurs, cette envie de sortir des sentiers battus, de renouer avec des rencontres humaines, de découvrir de nouvelles cultures à côté de chez nous. » Au sortir du premier confinement, il poursuit son étude par un travail de terrain, en commençant par sa région natale, l’Occitanie, où il fait ses premières rencontres inspirantes : des frères qui rénovent des burons en Aubrac, des passionnés d’agropastoralisme dans les Cévennes, une association qui participe à la réintroduction de l’ours dans les Pyrénées, etc. S’en suit une deuxième étude sur l’effet Covid, mais surtout un blog – En Immersion- , créé en juillet 2020, où il commence à référencer ses coups de cœur en donnant le contact des habitants rencontrés. Le mouvement est lancé…

Qu’est-ce qu’une micro-immersion ?
Une micro-immersion consiste à passer trois jours minimum à la découverte du quotidien d’un habitant et comprend un hébergement, une activité en immersion et des activités en autonomie. L’hébergement peut avoir lieu chez l’habitant directement ou dans des chambres d’hôtes partenaires. L’activité avec l’habitant est le moment fort de l’immersion et peut durer entre une demi-journée à plusieurs jours. Enfin, les activités en autonomie vise à encourager le voyageur à découvrir le terroir aidé par un guide digital fourni par Loïc et son équipe, mais aussi l’habitant en tant que personne ressource qui peut conseiller telle randonnée, tel site, etc. Afin de professionnaliser son offre, courant 2021, Loïc change de statut, s’immatricule à Atout France, et troque le blog pour l’agence de voyage, ce qui lui permet de poursuivre la diversification de ses micro-immersions en alternant prospection et identification des personnes ressource, co-construction de l’offre avec les habitants identifiés puis sa mise en ligne et commercialisation. « Parfois les habitants nous contactent directement, comme Fabienne et Pierre dans le Larzac, propriétaires de chambres d’hôtes dans la vallée de la Dourbie qui souhaitaient renforcer leur offre. Chaque matin, leur maison est survolée par les vautours. Pour valoriser ce lieu exceptionnel et construire cette micro-immersion, nous avons fait appel à un guide expert du vautour. En Armagnac, en revanche, j’ai cherché longtemps une femme ou un homme qui défendait ce savoir-faire pour mieux immerger les voyageurs. » Sur le site de Loïc, les micro-immersions sont présentées par thématique (nature, culinaire, festivités locales), par saison, à la journée ou en plusieurs jours. Ainsi, Florence, docteur en géologie, vous amène sur les traces des dinosaures dans les Cévennes ; Gaël, natif de la région et photographe animalier, vous propose d’observer la faune sauvage sur le plateau de l’Aubrac ; Yoann vous fera vivre les estives au cœur d’une exploitation de brebis des montagnes basques. Les voyageurs peuvent ainsi faire leur choix et réserver facilement la micro-immersion qui les séduit.

Des micro-immersions pour un tourisme rural levier de développement durable
Cette volonté de mettre en lumière des territoires oubliés est également très bénéfique à un tourisme durable, permettant de déconcentrer et de mieux répartir les flux touristiques au profit de terroirs souvent délaissés des grandes vagues voyageuses. En ce sens, le projet d’En Immersion s’inscrit dans l’air du temps, le voyage lointain gourmand en carbone se voyant de plus en plus pointé du doigt quand le covid a encore rebattu les cartes valorisant d’autant plus les découvertes de proximité. Loïc : « Notre projet a correspondu à un mouvement de fond mais il s’agissait d’une envie sincère de proposer une découverte culturelle sans prendre l’avion. Elle avait germé en amont du Covid. Lorsque nous avons fait notre business plan, un chiffre nous a marqué : 80% des nuitées en France sont en ville, sur le littoral ou à la montagne. Or ces lieux représentent moins de 30% du territoire. Si on tourne à l’inverse ce chiffre, 70% des zones les plus rurales ne comptent que 20% des nuitées. » Sur le portail en ligne, « Rendez-Vous en terroir inconnu » fait ainsi un clin d’œil malicieux à l’émission grand publique que l’on ne présente plus. Et si le concept rencontre un franc succès, l’idée n’est pas non plus de grossir sans conscience, au contraire, Loïc a fixé un quota de fréquentation pour chacune de ses offres afin qu’en moyenne, elles ne dépassent pas 50 à 70 nuitées à l’année, façon de préserver la destination et les acteurs locaux, d’autant qu’il s’agit toujours de micro-immersions privatisées d’une à quatre personnes en moyenne. Pour les habitants, il s’agit donc surtout d’un complément de revenu bienvenus, qui les aide à poursuivre leur activité principale. Et signe que le concept séduit vraiment, de plus en plus d’offices de tourisme mais aussi de Comité départementaux ou régionaux du tourisme contactent Loïc pour développer des micro-immersion sur leurs territoires, à l’image de la région Occitanie, qui a largement soutenu le projet qui correspond à son souhait de développer activement le tourisme de proximité.

Des projets pour demain
Forte de 50 micro-immersion d’ores et déjà créées, la plateforme est effective depuis mai 2021, avec pour ambition d’en avoir 150 d’ici l’été 2023 puis 300 d’ici trois ans. Pour l’heure, Loïc et son associée Marine se rémunèrent via une commission de 15% sur chaque vente, revenu auquel s’ajoute les collaborations avec les OT, CDT ou CRT, qu’ils ont accompagné pour la création de séjours touristiques plus immersifs. « Nous avons commencé en Occitanie, mon berceau natal, aidé par l’incubateur de la région. Depuis, nous avons développé des micro-immersions en Nouvelle Aquitaine, dans le Mercantour, au Nord de la France… D’ores et déjà, plus de 200 voyageurs sont partis en immersion et notre note moyenne est de 9,8/10. Mais, le chiffre dont nous sommes le plus fiers est que 100% de nos voyageurs nous attestent que sans nous, ils n’auraient pas pu vivre cette expérience. »
———- Aller plus loin ———–
Par Geneviève Clastres
Auteur et journaliste indépendante spécialisée sur le tourisme durable et le monde chinois, Geneviève Clastres est également interprète et représentante de l'artiste chinois Li Kunwu. Collaborations régulières : Radio France, Voyageons-Autrement.com, Monde Diplomatique, Guide vert Michelin, TV5Monde, etc. Dernier ouvrage "Dix ans de tourisme durable". Conférences et cours réguliers sur le tourisme durable pour de nombreuses universités et écoles.
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