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Casamance, ce royaume qui attend les voyageurs…

« Ici, c’est un royaume. On ne décide pas pour le roi, ça vient comme ça. Depuis le décès du dernier, il n’y en a pas. » On ne le sait pas toujours, mais le nom de Casamance viendrait de l’expression « Kasa Mansa », le roi du Kasa, l’un des royaumes de cette région du Sénégal si attachante qui en compte quatre. Quatre royaumes, un roi qui se fait attendre au Kasa, une situation nationale un peu compliquée, mais une terre fascinante toujours prête à accueillir les voyageurs. Lumière et fragments d’un  voyage réalisé avec Vision Ethique, agence engagée pour un tourisme plus solidaire en lien avec les populations locales.

Danse d’Alexis à Kabiline©GClastres

Un voyage intégré et des foyers améliorés

Voyager avec Vision Ethique, c’est aller au-delà de la simple découverte touristique pour s’immerger dans l’intérieur des terres. Là, votre présence trouvera tout son sens, puisque le cout carbone de votre voyage (25 € par personne) est réparti sur deux projets financés par l’agence (Kabiline et GITO). Dans le village de Kabiline donc, Vision Ethique reverse 12,5 euros par voyageur à l’association Atlantic Afrika qui forme les familles à la construction de foyers améliorés. Construits sur une base d’argile, comportant deux feux (un pour la sauce, l’autre pour le riz), ces derniers permettent d’économiser 30 à 45 % de combustible et notamment le bois, ce qui a plusieurs effets bénéfiques : lutter contre la déforestation mais aussi la pollution (diminution des particules fines) ;  sensibiliser les villageois aux coupes de bois, aux feux de brousse et enfin, améliorer la cuisson des aliments. Silyak Mary (Atlantic Afrika) : « Nous avons développé ces foyers à partir d’un modèle existant qui ne comportait qu’un feu et des parois plus étroites. On a conçu ensuite des fiches techniques et on forme les familles pour qu’elles soient autonomes. Les foyers peuvent conserver la chaleur pendant 24h et ont une durée de vie de 10 ans. » Les familles fournissent l’argile, la paille et la bouse de vache qui serviront à faire les parois (10 cm), la salive des termites viendra ensuite consolider le lien, véritable colle utilisée comme telle. Grâce à ces foyers, les familles ne consomment plus que 6 kilos de bois par jour et participent indirectement au reboisement de la mangrove. Chaque foyer coute 30 € à l’association. L’an dernier, elle en a réalisé 1649, l’objectif est d’en construire 1250 en 2024.

Foyers améliorés de Kabiline©DR

« Levons-nous pour travailler ensemble ».

Un immense sourire barrant un visage baigné de soleil, Alice Nina Diamaconne nous attend devant le siège du GITO, coopérative de 976 femmes existant depuis 2010 et répartie en 24 groupements dont la devise est « Levons nous pour travailler ensemble ! ». Nous sommes dans l’un des quartiers d’Oussouye, 2e grande ville de Casamance, curieux de découvrir cet autre projet soutenu par Vision Ethique. Le GITO,  c’est à la fois ces groupements de femmes mais aussi les blocs de maraichage où elles collectent les fruits et légumes qui risquent de se perdre et qui seront ensuite transformés et valorisés par onze permanentes dans le local où nous nous trouvons. Ce jour-là, elles sont une dizaine à couper des petits morceaux de papaye qui finiront en confiture. La recette est écrite à la craie sur un tableau d’ardoise, jouxtant celle du sirop de citron que nous aurons l’occasion de déguster. Fruits séchés, sirop, confitures, sauces, conserves, mais aussi farine et complément alimentaire, autant de façon de valoriser mangues, goyaves, maad (fruit local), tomates, aubergines, choux et bien d’autres cultures encore. Alice Nina : « Avant les femmes n’arrivaient pas à tout écouler. Le Gito est à a fois un moyen d’éviter le gaspillage mais aussi une façon pour elles de s’émanciper, de participer aux travaux, et de percevoir un complément de revenu. »

AliceNina (GITO)EtCarolineDebonnaire (Vision Ethique)©GClastres

Sur place, l’association est bien organisée. Alice préside, Sabel gère les stocks et Lucie s’occupe de la trésorerie. Tous les deux mois, les femmes se réunissent et une fois l’an, l’Assemblée Générale vient clôturer l’année. Alice Nina : « Notre plus grand problème reste la commercialisation. Nous avons beaucoup de stock et du mal à vendre. » Il faut dire que les autorisations de vente sont parfois compliquées à obtenir de Dakar, ce qui nuit à la conservation des produits. En outre, les aides arrivent parfois en dépit du bon sens, comme ce four-séchoir solaire livré sans ses grilles, et donc inutilisable. Heureusement, le GITO bénéficie d’un terrain donné par la commune d’Oussouye et Vision Ethique propose justement d’aider l’association à financer l’agrandissement de la salle de transformation grâce aux fonds récoltés auprès des voyageurs. Véritable cercle vertueux qui a fait des émules, le GITO a inspiré de nombreux villages alentours. En 2023, il a réalisé près de 10 000 € de chiffre d’affaires avec notamment son produit phare (70% des ventes), la farine enrichie (de mil, sel, pain de singe, haricot niébé, etc.), ce qui permet aux plus jeunes et aux personnes âgées de bénéficier d’un aliment très nutritif adapté à leurs besoins.

GIE de Gito©GClastres

A la rencontre des artistes et artisans locaux

Au-delà des projets qu’elle soutient, Vision Ethique souhaite aussi privilégier les moments de détente et valoriser la culture et les traditions des pays qu’elle explore. C’est ainsi que nous nous retrouvons dans les jardins de l’Alliance française de Ziguinchor, pour un atelier participatif avec Mickael Daffé, artiste local qui travaille essentiellement avec des matériaux  naturels. A la fois peintre et sculpteur, Mickael a installé une grande table sur laquelle il nous propose de réaliser une œuvre commune à base de fibres de coco et de peintures. Lui-même a réalisé plusieurs tableaux qu’il a exposé non loin, en écho à quelques statues et à un tableau fascinant réalisé à l’aide d’une termitière. Les termites encore, maitresse de la colle pour les foyers améliorés, devenues assistantes d’artiste pour un tableau dessiné par leurs morsures. A la tête de Vision Ethique, Caroline nous explique que lors des séjours qu’elle organise, les voyageurs réalisent des statuettes avec des fibres de coco, des œuvres plus personnalisées qu’ils peuvent ensuite ramener chez eux.

Atelier créatif avec Mikael Daffé@DR

Autre lieu, autre rencontre, en immersion au cœur de la fabrique de noix de cajou artisanale de Joseph Diamako, une « petite entreprise » qui existe depuis 2001. « On décroche difficilement », nous glisse  Joseph, affaibli mais vaillant, à la tête de 15 employés. Dans cette région d’Oussouye, on cultive l’anacardier, près de 10 hectares de ce petit arbre à la cime évasée qui produit à la fois noix de cajou et pomme de cajou. Cette dernière peut se consommer directement ou être transformée en confiture, jus frais ou fermenté, devenant vin de cajou, liqueur ou eau de vie (sum sum de cajou). « Mais c’est les noix, surtout, qui intéressent les hommes et que nous exportons en Europe », nous glisse Joseph, qui reste le seul à les travailler de façon totalement artisanale, ses employés allant jusqu’à  les décortiquer à la main. La préparation se fait en cinq étapes : cuisson (1 h à ébullition dans un tonneau « vintage »), séchage au soleil (1h), décorticage de l’amande (entièrement à la main donc), torréfaction (pour  rendre l’amande comestible) et enfin nettoyage et dé-pelliculage.

Cuisson de noix de cajoux chez Joseph©GClastres

 « On peut alors passer à la dégustation… », achève Joseph dans un sourire. Et, alors que nous avons suivi une à une toutes les étapes avec force démonstration, nous voici devant une table garnie de paquets de noix de cajou dont les noms sont aussi facétieux que leur propriétaire : Réveil Papa (amandes de cajou grillées pimentées), Réveil Maman (amandes de cajou grillées poivrées), Miam-Miam (amandes de cajou grillées au citron), etc.  Toutefois, Joseph a une dernière chose à nous confier.  « Aujourd’hui, alors que nous créons des emplois pour les gens du village, nous devons nous battre avec des géants comme l’Inde qui a cassé les prix et qui fait la guerre aux petits producteurs» Pour l’heure, heureusement, la petite entreprise de Joseph continue à fonctionner. Elle produit plus d’une tonne de noix par an et peut écouler ses stocks, notamment grâce aux voyageurs qui viennent régulièrement. « Une dame nous a découvert il y a 20 ans et depuis, on est dans le Guide du Routard ! ». Un nouvel exemple, s’il en fallait encore un, de l’importance d’aller directement à la source, d’autant que les noix de cajou achetée sur place n’ont rien à voir avec celles que vous trouverez dans le commerce. De quoi réveiller papa et maman, certes, mais surtout vos papilles !

Achat de noix de cajoux chez Joseph©GClastres

VOYAGER AVEC VISION ETHIQUE EN CASAMANCE ICI !!

GIE de Gito©GClastres

Casamance, ce royaume qui attend les voyageurs… | ©VOYAGEONS AUTREMENT
Par Geneviève Clastres
Auteur et journaliste indépendante spécialisée sur le tourisme durable et le monde chinois, Geneviève Clastres est également interprète et représentante de l'artiste chinois Li Kunwu. Collaborations régulières : Radio France, Voyageons-Autrement.com, Monde Diplomatique, Guide vert Michelin, TV5Monde, etc. Dernier ouvrage "Dix ans de tourisme durable". Conférences et cours réguliers sur le tourisme durable pour de nombreuses universités et écoles.
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