#TourismeDurable
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Les Karellis : un exemple de tourisme social et associatif en montagne

Non la montagne n’est pas forcément réservée à une élite, et elle peut aussi accoucher de belles destinées. Il est un exemple, durable et pérenne qui plus est, qui veut montrer que la neige, les sommets, sont aussi adaptés à des budgets plus modestes et à des familles. Je vous embarque faire un tour dans l’histoire de l’aménagement montagnard de la Savoie ainsi que dans son présent, car celui -ci est riche et plein de promesses. Hiver comme été, c’est le royaume des familles et des prix plus doux qu’à l’accoutumée. L’utopie touristique a un nom : les Karellis.

Les Karellis station familiale par excellence ©Alban Pernet 2015

Les Karellis, station familiale par excellence ©Alban Pernet 2015

Une coopération unique entre collectivité et monde associatif

Rendez-vous en Maurienne, vallée Savoyarde, plus précisément dans la campagne de Montricher-Albanne. Sur ces alpages bien exposés à 1650 mètres d’altitude, s’est joué une jolie histoire au début des années 70 : une utopie qui a mené ce joli coin de montagne à devenir un des fiefs du tourisme associatif made in France. Un rendez-vous unique entre une volonté de lutter contre la désertification rurale et celle de promouvoir un tourisme montagnard sans subir les assauts de promoteurs avides d’espaces vierges à construire… et donc en conséquence de lutter contre une envolée des prix. Bref un sacré programme. Et des activités pour toute la famille et la volonté que ceux-ci n’aient pas à ressortir le porte monnaie durant leurs séjours. Un système ingénieux qui permet notamment aux touristes de bénéficier de forfaits skis à tarifs intéressants.

Les Karellis ont développé une certaine image d'un tourisme plus ouvert ©Alban Pernet 2015

Les Karellis ont développé une certaine image d’un tourisme plus ouvert ©Alban Pernet 2015

Sauver le village via un tourisme maitrisé

Fin des années 50, l’école de Montricher ferme, l’activité agricole périclite dangereusement. Que faire pour enrayer cela sans tomber dans les abus de spéculation foncières de quelques vallées voisines?  Le salut viendra du projet d’un homme, Pierre Lainé, qui apportera aux élus une notion peu courue en ces temps : le développement harmonisé. Les élus de l’époque, courageux et visionnaires en diable vont abattre une carte maîtresse, à savoir l’achat par la commune des terrains qui seront ensuite cédés aux associations. Le développement harmonisé c’est le travail de deux économistes : François Perroux et Joseph Lebrat, c’est en fait un schéma de développement et d’aménagement qui est destiné à des zones d’économies fragiles ou faible, Pierre Lainé va ainsi transposer cette théorie au tourisme. Insistant sur labsolue nécessité de l’épanouissement entier de la zone touchée : économiquement parlant, socialement, culturellement. Ceci sonne comme une révolution. Et surtout, un avant goût de développement durable (d’ailleurs l’architecture, le système de chauffage ont aussi été réfléchis pour éviter les gaspillages énergétiques, les déplacements trop fréquents et la limitation de la pollution visuelle). Pierre Lainé était le fondateur de l’association Renouveau, militant pour le droit à des vacances pour tous, sans corporatisme avec le souhait d’un épanouissement personnel et la volonté de rencontres. La coopération entre la municipalité et l’association allait ainsi permettre d’éviter la spéculation foncière :  le fait de garder la maîtrise des sols permet à la commune de ne pas revendre le foncier. Renouveau sera donc le concessionnaire pendant 30 ans (renouvelé en 1997) et la commune aura un droit de regard sur son évolution. Renouveau mettant en place, ensuite, un bail emphytéotique (bail immobilier de très longue durée) avec les centres de vacances associatifs adhérants au projet. Cette convention sera le lien aussi entre Renouveau et les autres structures associatives qui vont venir se greffer à l’utopie Karellis. Et la ligne directrice reste la même : un lieu de vacances à taille humaine, le souhait d’accueillir du public à des coûts raisonnés, le refus d’avoir des créations de lits privés, le respect absolu des lois sociales pour tous. Tout cela est débattu démocratiquement entre prestataires sous l’égide d’un conseil supérieur des Karellis, c’est à dire un organe qui régie, décide des orientations et projets de la station. Originalité, si tous les prestataires (hébergeurs, école de ski et remontées mécaniques) proposent, débattent et votent, seuls les élus y ont droit de véto.

Une station créée aussi pour le bien être des saisonniers

Condition sinequanone à la création de la station : l’importance de créer des emplois destinés aux locaux ou régionaux, et, chose innovante pour l’époque : une grande importance est faite au confort et au bien être des saisonniers. Ayant pu observer de graves manques au sein d’autres stations auparavant, Pierre Lainé avec les responsables de la commune et les hébergeurs, vont s’attacher, ainsi que leurs successeurs au respect des lois sociales (repos des salariés, attention particulière aux surcharges d’heures, formation continue) ainsi qu’au fait de favoriser si possible l’emploi de personnes de la vallée ou du moins de la région. Cette notion permettant aussi le soutien sans faille des populations locales qui prirent fait et cause pour ce projet. On peut penser que sans cette création les deux communes de Montricher et d’ Albanne auraient périclité. Un lotissement a été créé, ainsi que des commerces… il y a maintenant plus de 650 habitants dans le village et une image plutôt bonne dans la région, marquée par le dynamisme et les idées novatrices des habitants.

Des séjours tout compris symbole des Karellis ©Alban Pernet 2015

Des séjours tout compris symbole des Karellis ©Alban Pernet 2015

Quelles concrétisations pour les touristes?

Premier but : faire venir en montagne, hiver comme été des populations qui ne pouvaient pas s’y rendre. Ainsi, quand vous venez passer un séjour aux Karellis, tout est fait pour que celui-ci soit le plus complet possible. Exemple : le forfait de ski est intégré à votre semaine hivernale, et les hébergeurs achètent en grand nombre les forfaits auprès des remontées, ce qui fait évidemment baisser les prix. On trouve des semaines à 500 euros pour un adulte pension complète avec forfait 6 jours, les animations, la nurserie si besoin, les clubs enfants. L’été, c’est encore moins onéreux puisque les séjours sont, selon les semaines, de maximum 400 euros avec piscine, remontées, animations… La station est sans voiture et est labellisé Famille plus. Une attention particulière est portée aux enfants et aux bébés avec des animateurs diplômés, des nurserys de qualité. Et pour les fans de skis, la station a une excellente réputation (avec un télésiège chauffant notamment), de même que des centaines de kilomètres de sentiers balisés qui partent directement des résidences. Un tourisme été-hiver très prisé et une station où la frime n’a pas lieu d’être, un esprit différent dans ce coin de montagne où l’utopie, le rêve sont devenus quotidiens.

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Je voulais, au travers de cet article rendre hommage  au tourisme social, solidaire, familial. Celui-ci porté, par les accords de 1936, a son eldorado dans ce joli coin de Savoie. Cet exemple est-il transposable ailleurs ? La réussite de ce projet un peu fou est-elle envisageable au siècle du profit à outrance et des laissez pour compte ? En tout cas les Karellis existent, vivent, et ont des projets d’avenir. J’en veux pour preuve les milliers d’enfants et de familles qui, de saisons en saisons, ont pu profiter d’un air pur et d’animations sportives ou culturelles.  

Les 7 hébergeurs du site sont : Les Balcons de Maurienne, Arc-en-Ciel, Villages club du soleil, Odésia, Azureva, les Carlines et les gîtes, gérés par la station.

Merci tout particulier à Rémi Nicolas des Balcons de Maurienne pour son aide précieuse.

http://www.karellis.com/fr/


Les Karellis : un exemple de tourisme social et associatif en montagne | ©VOYAGEONS AUTREMENT
Par Guillaume Chassagnon
Amoureux des montagnes, des hommes y vivant. j'aime les parcourir, les photographier, les découvrir et donner envie de les fréquenter. Sac à dos, livres et appareil photos sont mes outils quotidiens. Je travaille aussi pour de la presse quotidienne pour notamment montrer le dynamisme culturel et associatif de mon territoire. A bientôt sur les sentiers, autour d'un bon verre de vin, d'un plateau de fromage ou dans une librairie! Et à la fac d'Avignon of course
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